Depuis une semaine maintenant, les relations publiques de la Maison-Blanche - déjà fortement perturbées depuis l'entrée en fonction de Donald Trump - ont sombré dans un indescriptible chaos avec la nomination d'Anthony Scaramucci comme nouveau directeur des communications, fonction qui ne cadre pas vraiment avec son parcours de financier de Wall Street.

Investi de la responsabilité de mieux communiquer le programme hautement aléatoire de l'inquiétant Donald Trump, Anthony Scaramucci donne plutôt l'impression depuis une semaine de s'être donné pour mission de semer la terreur au sein de l'entourage présidentiel.

Personnage haut en couleur, flamboyant et très en vue à Wall Street, ce fils d'immigrant italien qui a grandi à Long Island a trimé dur pour se faire une place dans le monde de la finance.

Diplômé en droit de l'Université Harvard, il a amorcé sa carrière à la banque d'affaires Goldman Sachs, d'où il a été congédié avant d'y être réembauché.

Il a par la suite fondé sa propre firme de placement SkyBridge Capital, qui cumulait des actifs sous gestion de 11,4 milliards lorsqu'il l'a vendue l'an dernier dans le but avoué d'occuper un poste de conseiller au sein de l'équipe de Donald Trump. Selon le magazine Forbes, sa fortune est évaluée entre 45 et 65 millions.

Membre assidu du Forum économique mondial (FEM) de Davos, où, à titre de financier, il a participé aux 10 dernières conférences annuelles, Anthony Scaramucci s'est présenté cette année au FEM sous sa nouvelle mouture de membre de l'équipe de Donald Trump.

Il était en fait le seul représentant de la nouvelle administration américaine - Donald Trump a prêté serment le 20 janvier, au dernier jour du Forum économique mondial -, alors que toutes les discussions de la conférence annuelle tournaient invariablement autour du profond climat d'incertitude dans lequel l'élection de l'imprévisible président populiste avait plongé le monde.

Anthony Scaramucci avait été invité pour animer l'atelier portant sur les perspectives américaines selon le nouvel horizon Trump et il avait expliqué et défendu avec courage et éloquence le programme du président désigné.

Rien à voir avec les propos hystériques, décousus et grossiers qu'il a tenus depuis sa nomination comme directeur des communications de la Maison-Blanche.

J'avais même été fasciné par ce personnage aux origines modestes, fringué dans un costume à 20 000 $ - il me rappelait Jordan Belfort, le loup de Wall Street, mais en beaucoup plus sophistiqué et éloquent -, qui discourait de tous les grands enjeux de la présidence avec une perspective historique solide et une vision conséquente.

Fait à souligner, ce panel où Scaramucci était seul sur scène en face d'un journaliste se déroulait tout juste après la séance inaugurale du Forum économique qui mettait en vedette le président chinois Xi Jinping, qui s'était livré à un long et très détaillé plaidoyer pour la mondialisation économique et l'ouverture des frontières.

Scaramucci voulait donc rassurer son auditoire sur le programme de Donald Trump en adoucissant tous les aspects cassants et brouillons qu'avait distillés le candidat républicain durant la campagne électorale.

Il avait patiemment disséqué toutes les positions extrêmes de Donald Trump concernant la Chine, le protectionnisme, l'Europe, l'avenir de l'OTAN ou l'immigration.

Il avait comparé l'accueil indigné de la communauté internationale à l'élection de Donald Trump au sort qui avait été réservé à Ronald Reagan, lors de son élection de 1981.

« Huit ans plus tard, tout le monde a convenu que Reagan avait été un grand président, et non pas ce président militariste que l'on avait dépeint au départ », avait-il mis en garde son auditoire.

Bref, c'est peut-être pour la clarté avec laquelle Anthony Scaramucci avait été capable de rendre compréhensibles les positions incongrues, contradictoires et souvent formulées sur le coup de l'impulsivité de Donald Trump que ce dernier l'a nommé pour diriger les communications à la Maison-Blanche.

Manifestement, Anthony Scaramucci n'est pas fait pour ce job. À moins que ce ne soit son patron qui lui a demandé de jouer le ton de la grossièreté et de la rudesse pour faire le ménage dans son entourage.

Les gens de Wall Street ne voyaient certes pas l'homme occuper pareille fonction. Beaucoup le voyaient devenir ambassadeur des États-Unis au sein de l'Organisation de coopération et de développement économique.

François Trahan, fondateur et associé de la firme Cornerstone Macro à New York, a déjà croisé Anthony Scaramucci, mais il ne le connaît pas personnellement. Il représente toutefois le prototype des gestionnaires de Wall Street.

« J'ai plusieurs clients qui ont le même style que "The Mooch". Le genre qui parlent très bien, qui sont super bright, un peu arrogants. Ils ont souvent un surnom et la plupart du temps, ils sont issus de l'Ivy League [l'élite universitaire américaine] », explique le stratège boursier.

Mais rien n'explique le comportement erratique des derniers jours d'Anthony Scaramucci. L'homme détonne dans ses nouvelles fonctions et ne fait que nourrir le climat de panique totale qui a gagné la présidence des États-Unis.