Des années de minutieuse préparation, d'engagement, de sacrifices. Rien n'est laissé au hasard, tout est planifié au quart de tour. Et puis survient une blessure qui vient cruellement chambouler le rêve d'une médaille olympique.

Alexandre Despatie vient de frôler le précipice. Le plongeur émérite de 27 ans se relève d'une profonde entaille au front qu'il s'est infligée en heurtant le tremplin alors qu'il pratiquait un saut à coefficient de difficulté élevé. Une routine qu'il a effectuée sans problème des centaines et des centaines de fois. Mais pas cette fois-ci, à six semaines seulement de l'ouverture des Jeux de Londres.

Un moment d'inattention, un manque de concentration, une erreur d'exécution, un mauvais coup du sort peuvent anéantir en une fraction de seconde des milliers d'heures d'entraînement. C'est le risque que courent les athlètes de haut niveau quand ils cherchent à se dépasser. Ils n'ont pas le choix s'ils veulent être la crème de la crème. Les blessures sont en quelque sorte inhérentes à la pratique du sport, presque inévitables.

Alexandre Despatie en sait quelque chose. Depuis que les Québécois ont fait la découverte de l'adolescent surdoué de 13 ans aux Jeux panaméricains de 1998, les blessures ne l'ont pas épargné. D'ailleurs, après avoir été contraint à l'inactivité durant neuf mois, le doublé médaillé olympique s'est qualifié in extremis en février dernier pour les Jeux de 2012.

Quand le corps, aussi performant soit-il, flanche, le doute peut s'installer dans l'esprit de l'athlète. Le courage et la détermination peuvent ne pas suffire. La pression sur ses épaules est à son comble aux Olympiques, les attentes sont énormes. La confiance en soi ne peut souffrir de déficience. Une légère baisse de régime peut faire la différence entre un podium et une 12e place. La marge de manoeuvre est mince, une erreur pardonne rarement.

Parlez-en à Nicolas Gill, ex-champion de judo qui a décroché l'argent à Sydney et le bronze à Barcelone. Une blessure au genou subie quelques mois auparavant est venue le hanter aux Jeux d'Athènes où il s'est fait surprendre à son premier combat. À Londres, Alexandre Despatie pourra-t-il effectuer son triple périlleux triple et demi retourné, un saut qu'il doit maîtriser pour espérer monter sur le podium, sans craindre de percuter à nouveau le tremplin?

Mais parfois, les aléas de la vie emmènent des athlètes à se surpasser. Ainsi, quelques jours après le décès subit de sa mère à Vancouver, la patineuse Joanie Rochette a, malgré sa douleur, arraché la médaille d'e bronze.

Le corps d'un athlète est capable de performances époustouflantes, hors du commun. Mais ce n'est pas une machine. Sa complexité réside aussi dans sa fragilité. L'accident d'Alexandre Despatie nous le rappelle que trop bien. Toutefois, l'espoir est de mise: comme il l'a laissé savoir après son opération mercredi, «le rêve olympique est toujours vivant».