Alors qu'un ouragan secoue les fondations des systèmes bancaires américain et européen, les institutions financières canadiennes auraient toutes les raisons de se péter les bretelles.

Les grandes banques du pays continuent d'engranger des profits. Bien sûr, récession oblige, ils sont moins faramineux. Néanmoins, ils dépassent les prévisions des analystes. Ce n'est pas monnaie courante ces temps-ci: les mauvaises surprises économiques dépassent largement les bonnes sur les fils de presse.

 

Quand le chef de file national, la Banque Royale, déclare un bénéfice de 1 milliard au dernier trimestre, on conviendra qu'on est loin de la dèche. Idem chez ses concurrents canadiens: 712 millions à la TD, 69 millions à la Banque Nationale (même si le papier commercial lui a fait mal), et 147 millions à la CIBC. Les marchés boursiers ont d'ailleurs salué leurs résultats encourageants, la semaine dernière, en faisant bondir les titres financiers.

Au sud de la frontière, c'est une tout autre histoire. Les banques américaines continuent de tirer le diable par la queue. Elles souffrent d'une profonde sous-capitalisation et peinent à garder la tête hors de l'eau. Les déficits abyssaux se succèdent.

Pas plus tard que vendredi, l'administration Obama a été forcée d'accroître sa participation à 36% dans Citigroup, provoquant un effondrement de l'action. La menace de nationalisation (mot honni aux États-Unis) pèse sur d'autres banques, dont la plus importante, Bank of America, qui ne tient aussi qu'à un fil. Le gouvernement américain n'a pas fini de renflouer le système financier. Il prévoit injecter au moins 250 autres milliards, en plus de la bouée de sauvetage de 750 milliards déjà accordée par le Congrès.

De l'autre côté de l'Atlantique, les grands patrons de la finance éprouvent aussi de sérieux maux de tête. Le système bancaire en détresse en Europe de l'Est a reçu une aumône de 25 milliards d'euros, entre autres de la Banque mondiale, vendredi. Sans compter la Banque d'Angleterre qui vient régulièrement à la rescousse d'institutions britanniques réputées comme RBS, HBOS et Lloyds.

De leur côté, les banques canadiennes ne connaissent pas de problème de liquidités et parviennent facilement à aller chercher du financement. Elles ne sont pas aux prises avec un marché immobilier en déroute. Bien que les conditions de prêt aux consommateurs et aux entreprises aient été resserrées, le crédit n'est pas carrément gelé.

Bref, la situation enviable de nos institutions financières est rassurante, malgré la récession qui sévit. Ce n'est pas pour rien qu'elles caracolent en tête du classement mondial des banques les plus fiables.

Évidemment, la crise économique commande une certaine prudence. On ne doit pas tenir pour acquis que les banques canadiennes passeront indemnes à travers la tempête. Le nombre de faillites et de créances douteuses pourrait grimper en flèche. Les bénéfices des institutions financières en seront forcément affectés.

Mais, au moins, leur survie n'est pas en jeu, contrairement à ce qu'on peut observer dans le reste de l'Occident. Le gouvernement fédéral ne devrait pas être contraint d'allonger des milliards pour les secourir. Ce sera autant d'argent qui pourra servir à relancer notre économie chancelante.