Les mots utilisés par le Bureau de la sécurité des transports (BST) sont forts et sans équivoque: les fameux wagons-citernes DOT-111 comportent des «lacunes critiques» qu'il faut corriger «immédiatement» car il y a un «risque fort de pertes de vie» en cas d'accident.

Et pourtant, on ne retrouve nulle trace de ce sentiment d'urgence dans la réponse du gouvernement Harper, qui s'en tient comme d'habitude à une déclaration toute faite, qui n'engage à rien, évoquant une éventuelle et lointaine action avec les États-Unis.

«La sécurité des Canadiens demeure la priorité de Transports Canada, a indiqué la ministre Lisa Raitt. Des représentants du Ministère sont en train d'examiner les recommandations. Le Ministère est déterminé à tout faire ce qui est en son pouvoir pour maintenir et renforcer la sécurité du secteur ferroviaire au Canada.»

La réaction de Mme Raitt est presque identique à celle qu'elle a eue sur le même sujet le 10 janvier, le 19 novembre, le 22 octobre, comme si tout rebondissement s'équivalait, comme s'il suffisait de répéter que la sécurité est une priorité pour la renforcer, comme si la ministre répondait à la place de l'industrie pétrolière, dans le fond.

Tout le problème est là. Les conservateurs se sont tellement rapprochés du lobby pétrolier qu'il est aujourd'hui difficile de distinguer l'un et l'autre, difficile de savoir qui parle au nom de qui, difficile de croire à la volonté d'Ottawa de mettre au pas une industrie qu'elle a fini par représenter.

Il est d'ailleurs intéressant de noter que la réponse donnée par la ministre Raitt, jeudi, est exactement la même que celle que donne le ministre de l'Environnement dans le dossier climatique depuis 2006: «il faut arriver à une solution nord-américaine»...

Or les trois recommandations dévoilées cette semaine exigent plus de volonté et de célérité, précisément l'inverse de ce qu'on a fait avec les gaz à effet de serre, l'inverse aussi de l'approche adoptée par les conservateurs dans le dossier ferroviaire ces dernières années.

Vrai qu'Ottawa a proposé des normes plus sévères pour les DOT-111 dans la foulée de la tragédie de Lac-Mégantic, mais rappelons qu'elle n'a fait qu'appliquer les recommandations du Bureau de la sécurité datant de... 2007.

En outre, deux des trois recommandations formulées jeudi ne concernent que le Canada, et non l'ensemble du continent. Inutile, donc, d'attendre Washington pour obliger les DOT-111 à ralentir à proximité des lieux habités, comme cela se fait déjà lors du transport de certaines matières dangereuses.

Inutile d'attendre les Américains pour exiger des plans d'intervention d'urgence le long des itinéraires servant au transport de grandes quantités de pétrole, comme cela se fait aussi pour certains convois.

Quand un organisme aussi crédible que le BST soutient que «les risques auxquels est exposé le public ont augmenté considérablement» au point où il importe d'agir «maintenant», il n'y a pas de place pour les réponses formatées, encore moins pour l'attentisme.

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