La rencontre au sommet entre Stephen Harper et Pauline Marois au sujet du pont Champlain, mardi, est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle. Bonne parce qu'elle traduit l'importance que lui accordent les deux gouvernements, mauvaise parce qu'elle montre le gouffre qui les sépare sur cette question.

Le remplacement du pont Champlain a beau être un enjeu capital que ne doit ralentir aucune préoccupation politique, il est aujourd'hui freiné par des chicanes de clocher qui n'ont pas leur place dans le dossier.

Deux enjeux critiques opposent en effet les deux gouvernements: le train léger et le financement du pont.

D'abord, l'intégration du mode de transport collectif à la future structure n'est pas réglée. Certes, le ministre Denis Lebel accepte maintenant l'idée d'inclure des rails dans son projet, mais là s'arrête son engagement. Tout le reste relève de Québec, à ses yeux.

Or il est virtuellement impossible d'arrimer deux projets de cette ampleur en se contentant de réunions occasionnelles. Le pont, avec ses nombreux raccordements et ses approches à réorienter, est d'une complexité inouïe. Le système léger sur rail (SLR), avec son tracé vers le centre-ville et son intégration au réseau routier de part et d'autre du fleuve, l'est tout autant.

D'où l'idée proposée par le ministre provincial Sylvain Gaudreault de mettre sur pied un bureau de projet unique intégrant les équipes chargées du pont ET du SLR, afin de penser, concevoir, élaborer et construire les deux projets d'un bloc. Seule façon d'inaugurer le tout en 2018.

Pourtant, Ottawa ne semble pas chaud à l'idée. Non seulement le ministre Lebel a-t-il répété que le pont était fédéral et le train provincial, mardi soir, mais les échos de la rencontre laissent croire à une fermeture de Stephen Harper sur cette question.

Cet entêtement politique est incompréhensible, d'autant que le gouvernement Marois s'est rendu à l'idée de financer son SLR par l'entremise du fonds Chantier Canada, comme l'exigeait Ottawa. Au tour de ce dernier de mettre de l'eau dans son vin.

Le deuxième point de discorde est le financement, qui lui aussi est victime d'un entêtement politique. Mais provincial cette fois.

Ottawa répète à qui veut l'entendre qu'il n'y aura pas de pont sans péage, une position qui devrait inciter Québec et le Grand-Montréal à mener enfin à terme leur réflexion sur le sujet. Or le gouvernement Harper a beau avoir fait connaître ses intentions il y a deux ans, rien n'a bougé depuis. Le gouvernement Marois se contente de réitérer son opposition au péage, comme Montréal et la région d'ailleurs.

Tout ce beau monde ferait oeuvre plus utile en poussant l'idée d'un réseau de péages métropolitain (sur les autoroutes et non les ponts, idéalement), afin d'éviter le ressac d'un unique péage et de tirer les recettes nécessaires aux routes et aux transports en commun, puis d'intégrer le fédéral aux discussions par la suite afin que le tout s'arrime en 2018.

Sur le bureau de projet, la balle est dans le camp d'Ottawa, mais sur le financement, elle est dans le camp de Québec.

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