Au fil des années, le projet Turcot a vu son budget augmenter et son échéancier sans cesse repoussé. Tout cela parce que le gouvernement libéral a multiplié les annonces prématurées en s'appuyant sur des informations partielles et imprécises.

Annonçant le projet à son tour, hier, le gouvernement Marois a juré qu'il ne répétera pas les erreurs de son prédécesseur. Il a fixé des balises d'intégrité, un prix plafond et un échéancier qu'il juge plus réaliste afin d'éviter tout dépassement de coûts.

Cette fois est-elle la bonne? Rien ne le garantit.

Certes, sur le plan de la probité et de la transparence, les péquistes semblent avoir fait le nécessaire. La récente loi sur l'intégrité en matière de contrats publics obligera toutes les entreprises et leurs administrateurs à se soumettre à un examen de «bonne conduite» de la part de l'Autorité des marchés financiers avant d'obtenir le droit de travailler sur le chantier.

Par contre, l'encadrement du budget «final» et du nouvel échéancier du projet apparaît moins rigoureux.

La première ministre Marois a affirmé hier, de façon catégorique, que le chantier de reconstruction prendrait fin en 2020, et que la facture ne dépasserait pas les 3,7 milliards$. «À la limite, le projet pourrait coûter moins cher», a-t-elle ajouté, mais certainement pas un sou de plus.

L'air est connu. Il s'est fait entendre lors des annonces touchant le métro de Laval, le CUSM, l'échangeur Dorval ou encore, le Stade olympique! La différence cette fois, précise le gouvernement, c'est qu'un comité d'experts indépendant sera nommé pour veiller au respect du cadre budgétaire.

Mais dans ce cas, pourquoi ne pas avoir nommé le comité avant de fixer le cadre budgétaire? Pourquoi ne pas avoir validé le coût et le calendrier avant de fixer un budget final et un échéancier ultime? Pourquoi jurer que le plafond budgétaire de 3,7 milliards$ sera respecté... mais préciser du même souffle qu'il ne sera imposé qu'après avoir été revu de façon indépendante?

Bref, en quoi cette estimation est-elle plus «finale» que celle de l'an dernier? Cette question est capitale, car en terme d'infrastructures, le problème habituel au Québec n'est pas le respect des évaluations budgétaires... mais bien l'élaboration des évaluations budgétaires.

Peu importe le projet d'infrastructure, il est chaque fois question d'une estimation incomplète, d'une mauvaise définition des besoins, d'une analyse insuffisante des risques... et d'un gouvernement qui finit par hausser les budgets en plaidant les imprévus. Ce fut le cas du Train de l'Est, du CHUM et... de Turcot jusqu'ici, dont les coûts ont doublé en cinq ans.

Que le gouvernement Marois ait l'intention de se tenir loin des ornières de son prédécesseur, on s'en réjouit. Mais avec le niveau actuel de cynisme, de méfiance et de suspicion, il faut plus que de belles promesses pour le prouver, surtout lorsqu'il est question du plus important projet routier de l'histoire de la province.

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