Pauline Marois a adopté le ton juste depuis son élection, mardi. Conciliante, rassurante, ouverte au compromis, elle se dit «à l'écoute», prête à «mettre de côté les divisions» afin d'être «la première ministre de tous les Québécois».

Fort bien. Mais il faudra plus qu'un ton consensuel pour prouver que le message envoyé par les électeurs a bien été compris: il faudra laisser tomber les éléments du programme qui sèment l'inquiétude, qui divisent inutilement...

Bien difficile pour Pauline Marois, en effet, de «gouverner avec tous les partis», de «ramener la paix» au Québec, tout en proposant des mesures clivantes dont le bien-fondé ou la faisabilité est loin d'avoir été démontré, comme le cégep obligatoire en français, la citoyenneté et la constitution québécoises, la charte de la laïcité et l'extension de la loi 101 aux petites entreprises.

Il va sans dire qu'en obtenant une aussi courte victoire face à deux partis qui ne veulent rien savoir d'un référendum, le PQ n'a pas de mandat pour enclencher la «gouvernance souverainiste». Mais il n'en a pas non plus pour diviser les Québécois sur les questions de langue et d'identité.

C'est bien beau de tendre la main aux Premières nations et aux «compatriotes québécois de la communauté anglophone», de reconnaître l'importance de leur rôle dans l'histoire de la province, de les assurer que leurs «droits seront entièrement protégés», mais il faut accompagner une telle promesse de mesures à l'avenant.

Or assujettir les cégeps à la Charte de la langue française reviendrait, par exemple, à fermer plusieurs collèges de langue anglaise qui perdraient ainsi une clientèle francophone et allophone nombreuse. En plus d'être une atteinte claire à une institution anglophone, cela empêcherait 12 000 adultes chaque année de fréquenter le cégep de leur choix... sans qu'on n'ait jamais prouvé la nécessité d'une mesure aussi abusive!

Il est donc pour le moins étonnant d'entendre la chef péquiste citer «la nouvelle loi 101» parmi ses priorités, mercredi, soit le lendemain d'une élection gagnée de justesse face à un parti ayant atteint des sommets d'impopularité. La priorité du futur gouvernement Marois n'est certainement pas d'interdire et d'exclure, mais bien de réunir «les conditions gagnantes» pour une paix sociale retrouvée.

L'appui mitigé obtenu mardi devrait inciter Pauline Marois à donner un sens au fameux «nous» péquiste, à tendre vers des thèmes rassembleurs, à miser sur les consensus sociaux. Elle aurait intérêt à fuir les extrêmes, à miser sur des politiques inclusives, à se recentrer.

Bref, Mme Marois devrait tendre la main aux électeurs qui ne l'ont pas appuyé et aux Québécois qui ne se sentent pas accueillis dans son parti, plutôt que de répondre aux souhaits de ses députés les plus pressés.

La division des électeurs ne peut être une réponse à la division du vote.

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