Devant la possibilité d'une victoire à la Pyrrhus qui lui accorderait un gouvernement minoritaire tributaire de la CAQ, Pauline Marois invite un large éventail d'électeurs à l'appuyer. Peu importe qu'ils soient de gauche ou de droite, qu'ils veuillent ou non un référendum...

Au cours des derniers jours, en effet, la chef péquiste a tendu une main aux conservateurs souverainistes en les invitant à appuyer «le seul parti» capable de tenir un référendum. Puis en rencontre éditoriale, mardi, elle a tendu l'autre main aux progressistes, même fédéralistes, les enjoignant d'élire «le seul parti» capable d'adopter des politiques de gauche.

Bref, c'est un véritable grand écart que tente d'accomplir Pauline Marois à la veille du Jour J!

Que le Parti québécois courtise l'ensemble des indépendantistes, cela va de soi. Mme Marois veut faire du Québec un pays, elle souhaite la tenue d'un référendum, elle a consacré temps et énergie aux questions de langue et d'identité. Elle peut donc, légitimement, s'adresser à tous les souverainistes, fussent-ils conservateurs.

Par contre, il est plus difficile pour elle d'attirer l'ensemble des électeurs progressistes, comme elle souhaite le faire, y compris ceux qui n'ont pas d'intérêt pour la question constitutionnelle ou qui se qualifient de fédéralistes.

D'abord, il est un peu court de dire que l'élection n'est pas un référendum. Et donc, que les fédéralistes peuvent très bien appuyer le PQ mardi prochain, puis voter non lorsque la question de la souveraineté se posera.

Comme bien des Québécois, les progressistes peu portés sur les questions constitutionnelles ne veulent pas d'une vaste campagne référendaire. Ils ne veulent pas des divisions qui s'ensuivraient. Ils ne veulent pas que le gouvernement concentre ses énergies sur un tel enjeu alors qu'il y a tant à faire.

Ensuite, Pauline Marois n'a pas livré ce qu'elle avait promis aux progressistes, c'est-à-dire une révision en profondeur du projet de social-démocratie. En plus d'une réflexion sur la place du citoyen, sur la confiance des Québécois envers leurs institutions, elle s'était engagée en 2010 à «faire le ménage, à réduire la bureaucratie qui nuit à l'accessibilité des services aux citoyens», seule façon de préserver le filet social, selon elle.

Certes, il y a bien eu quelques discussions par la suite, mais sans plus. Comme en témoigne le programme du PQ, très axé sur un État fort, mais beaucoup moins sur les changements qui lui permettraient d'être réellement au service des citoyens advenant un gouvernement péquiste et sur les marges de manoeuvre financières nécessaires à son maintien. Or la justice sociale, l'égalité et la solidarité ne sont que des mots creux pour tout État incapable de se les payer...

On peut en conclure que l'avenir de la social-démocratie n'est pas une priorité au PQ, du moins pas au même titre que l'indépendance, la langue ou l'identité. Difficile, donc, pour Pauline Marois de rallier une frange de l'électorat qui ne partage pas son enthousiasme référendaire.

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion