Il va de soi qu'il ne faut pas céder face aux casseurs. Mais il ne faut pas davantage céder au laisser-aller.

En privilégiant la ligne dure, le gouvernement Charest répond au ras-le-bol d'une bonne partie de la population, particulièrement à l'extérieur de Montréal. Les manifestations parfois violentes, l'intransigeance des leaders étudiants et l'impact de cette crise sur un nombre élevé de personnes poussent nombre de citoyens à exiger de la fermeté du gouvernement.

Mais aussi populaire soit une telle attitude en dehors de la métropole et au sein du caucus libéral, force est de constater qu'elle n'a pas apaisé les manifestants jusqu'ici, qu'elle n'a même pas rapproché le Québec d'un centimètre d'une nécessaire sortie de crise. Pire, la loi 78 semble l'en avoir passablement éloigné.

C'est l'impasse, donc. À la veille du début de la saison touristique, du week-end de la F1, des Francofolies, du Festival de jazz, du festival Juste pour rire. À la veille, bref, de la période la plus importante pour Montréal sur le plan économique.

À moins que l'on soit prêt, collectivement, à payer le prix du maintien de la ligne dure coûte que coûte, Québec n'a donc d'autre choix que de se rasseoir rapidement avec les leaders étudiants, ce qu'il semble heureusement prêt à faire depuis mardi.

Vrai, le gouvernement est le seul à avoir fait des concessions jusqu'ici. Mais il est néanmoins le garant de la paix sociale et a, en ce sens, un double devoir : agir... sans reculer. Il a en effet le devoir d'agir pour dénouer l'impasse actuelle. Mais il a aussi le devoir de maintenir le cap sur la hausse décrétée pour éviter que la désobéissance civile devienne, à l'avenir, le moyen d'expression par excellence pour défier les décisions gouvernementales.

La marge de manoeuvre est donc étroite, mais pas inexistante. Il reste en effet trois cartes dans le jeu du gouvernement : le niveau de la hausse des droits de scolarité, l'engagement de Jean Charest dans les négociations et, ultimement, le renvoi ou l'abandon de la loi spéciale.

Or les impacts potentiels d'un pourrissement de la crise sont si importants qu'ils obligent Québec à abattre ses dernières cartes pour obtenir la fin de la grève, ou à tout le moins un essoufflement de celle-ci.

Le premier ministre Charest pourrait ainsi proposer de réduire de 50$ par année la hausse prévue depuis l'annonce initiale de l'étalement. La hausse serait donc de 200$ par année (plutôt que 250$), ce qui équivaudrait à une hausse de 46% sur 5 ans (plutôt que 75%).

La CLASSE refuserait une telle offre? Probablement, mais il faut s'y résigner. L'intransigeance d'une organisation ne peut être prétexte à l'inaction, sans quoi cette dernière obtient de facto le droit de prendre le Québec en otage.

D'où l'importance de s'adresser directement aux étudiants plus modérés en posant un geste fort qui répond directement à leur revendication principale. Au 102e jour de la crise étudiante, on ne peut plus espérer la fin complète de la grève, seulement sa marginalisation.

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