Signe indéniable de la popularité du vélo à Montréal: les pistes cyclables ont droit à leurs bouchons de circulation... et du coup, à leurs propres conflits entre usagers.

Certes, Montréal étend peu à peu le réseau depuis 2005. La Ville a déroulé de nécessaires prolongements, de nouvelles pistes et bandes cyclables ainsi qu'un important lien au centre-ville, si bien que le réseau est plus accueillant que jamais.

Mais parallèlement - et en partie conséquemment - le nombre de cyclistes a bondi. Il y a de plus en plus de navetteurs sur deux roues, mais aussi un nombre grandissant de cyclistes occasionnels et d'adeptes du BIXI.

Résultat: l'affluence des pistes cyclables a grimpé d'au moins 35% de 2008 à 2010, selon une étude de l'Université McGill. Ce qui ne surprendra aucun cycliste: la bande cyclable à sens unique Saint-Urbain est empruntée par 500 000 vélos par année, l'axe nord-sud (Christophe-Colomb - Berri) en voit défiler 900 000 et la piste de Maisonneuve, plus d'un million...

Mais cette popularité a son revers: elle sature le réseau. Ce qui génère deux fâcheuses conséquences.

D'abord, elle crée un effet d'engorgement, qui se traduit par d'inévitables conflits. Et pas qu'entre cyclistes, puisque scooters, patineurs, marcheurs et coureurs s'entassent aussi sur ce réseau déjà à capacité.

Ensuite, elle crée un effet de débordement. Un nombre croissant de cyclistes choisit de rouler ailleurs, une portion n'hésitant plus à emprunter les trottoirs, les voies réservées et les rues à sens inverse, créant, là encore, des tensions avec les piétons et les automobilistes.

Bref, on se retrouve avec des usagers du réseau routier qui ne sont pas à leur place sur le réseau cyclable, et des cyclistes qui ne sont pas à leur place sur le réseau routier.

Un grand ménage du printemps s'impose donc. Comme l'a d'ailleurs conclu il y a quelques jours une commission du conseil municipal qui s'est penchée sur la question du partage du réseau cyclable.

Les élus ont ainsi dressé une liste de ce qui a sa place sur les pistes cyclables (vélos, vélos à assistance électrique et patins à roulettes), excluant du coup marcheurs et coureurs. Ils ont recommandé la tenue d'un projet pilote pour les fauteuils roulants. Et ils ont demandé qu'on expulse les imposants scooters électriques des pistes, avec raison.

Abordant leur mandat de manière large, les conseillers ont même osé s'aventurer en dehors du réseau. Ils ont recommandé que les cyclistes aient accès aux voies réservées aux autobus et qu'ils puissent rouler à contresens dans les rues à sens unique.

Des conclusions fort pertinentes... qui souffrent toutefois d'un absent: les devoirs liés à ces droits. Car cette préséance accordée aux cyclistes sur le réseau cyclable et ces nouvelles incursions dans le réseau routier doivent s'accompagner d'un strict respect des règles, des feux de circulation et de l'interdiction de rouler sur les trottoirs.

Un ménage s'impose certes, mais chacun doit y participer.

francois.cardinal@lapresse.ca

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