Attendue depuis plus d'un an, l'étude gouvernementale sur l'implantation d'un TGV entre Québec et Windsor a été mise en ligne cette semaine sur un site web douteux (http://highspeedrail.ca/), sans communiqué ni conférence de presse.

On se serait attendu à moins de désinvolture pour un projet d'une telle importance. Surtout que le document du consortium EcoTrain, qui réunit notamment Dessau et KPMG, pourrait devenir le déclencheur d'une nécessaire réflexion collective sur le sujet.

Que conclut-il? Que le projet est rentable et doit aller de l'avant, comme l'affirme le maire Labeaume? Ou que le projet est trop cher et doit être repensé, comme l'ont interprété les élus de Windsor? Un peu des deux, ce qui lui donne justement sa pertinence...

On parle d'un projet «viable»... mais pas nécessairement «rentable». D'un projet qui se justifie... mais pas forcément sur ses tronçons d'extrémité, vers Québec et vers Windsor. D'un projet qui plairait à la clientèle d'affaires... mais qui menacerait la survie de Porter et Air Canada. D'un projet qui réduirait la motorisation dans ce corridor... mais qui n'empêcherait pas l'écrasante majorité des déplacements de se faire en auto.

On ne peut donc pas affirmer que le projet serait un succès garanti, pas plus qu'on ne peut prétendre l'inverse. De toute façon, les conclusions de l'étude de préfaisabilité sont trop hypothétiques pour qu'on en tire de grandes conclusions péremptoires, ce qu'évitent d'ailleurs de faire les auteurs. Il faut la prendre pour ce qu'elle est: un élément précieux de la réflexion.

D'abord parce qu'on est au tout début du processus, que le nombre de variables pris en compte à ce stade des études est faible et que la date de mise en fonction se calcule en dizaines d'années. Ensuite parce qu'on ne sait rien d'un éventuel plan d'affaires, de l'implication des provinces, des villes, du privé. Enfin, et surtout, parce qu'il s'agit d'un équipement collectif dont la valeur ne se calcule pas qu'en dollars et en cents.

Entendons-nous, un train à grande vitesse coûtera cher. Trop cher? L'étude nous donne un élément de réflexion en prévoyant une facture d'environ 20 milliards. Mais en soi, ce montant ne nous dit rien s'il ne s'accompagne pas d'une analyse plus vaste qui n'a pas encore été faite. Le rapport révèlera en effet toute sa pertinence une fois déposé sur la balance, avec les bénéfices politiques potentiels du projet, ses avantages environnementaux, mais aussi ses inconvénients, ses écueils possibles.

On peut bien émettre des doutes sur la rentabilité du projet, comme l'a fait le ministre Laurent Lessard lundi, mais il importe davantage, aujourd'hui, d'élargir le débat. Après tout, le TGV a le potentiel de devenir une sorte d'accord de libre-échange des personnes entre Montréal et Québec, entre Montréal et Toronto, voire entre Montréal et le Midwest américain. Une donnée importante au moment où le pouvoir se déplace vers l'Ouest...

Le TGV n'est donc pas qu'un choix comptable, c'est un choix de société qui mérite une vaste réflexion... et plus de sérieux de la part des gouvernements.

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