L'écrasante majorité des Canadiens résident à courte distance de la frontière américaine. Cela leur permet de visiter fréquemment les États-Unis, d'y magasiner quand le dollar est fort... et de prendre d'assaut, dit-on, les aéroports limitrophes.

À Vancouver, une partie des voyageurs fuient vers Bellingham et Seattle. À Calgary, ils optent pour Great Falls. À Toronto, ils conduisent jusqu'à Buffalo. Et à Montréal, ils se rendent à Plattsburgh, voire à Burlington.

Difficile de les blâmer, ils trouvent dans ces villes des aéroports subventionnés aux immenses stationnements gratuits et des billets d'avion d'autant moins chers qu'ils sont très peu taxés.

Cette concurrence, qualifiée de déloyale par les transporteurs et les autorités aéroportuaires, pose deux questions: y a-t-il exode? Et doit-on s'y attaquer?

Selon l'Association des hôtels du Canada, un voyageur canadien sur cinq s'est rendu en voiture aux États-Unis l'an dernier pour prendre l'avion. Le taux est impressionnant, comme en témoigne un dossier alarmant publié samedi dans le Globe and Mail. Mais il doit être relativisé.

D'abord, le problème est fort différent d'une ville à l'autre. Si on peut parler d'une hémorragie dans le cas de Toronto, dont l'aéroport exige des tarifs parmi les plus élevés au monde, il est plutôt question d'une fuite à Vancouver, et d'une perte, tout au plus, à Montréal.

Ensuite, pour avoir un portrait juste, il faut déduire tous ces Américains qui font le chemin inverse afin de prendre l'avion chez nous. Les transporteurs n'en font jamais mention, mais ils sont nombreux à se rendre dans un aéroport canadien pour voyager à l'intérieur du pays ou vers l'Europe.

Aéroport de Montréal évalue ainsi les pertes vers Plattsburgh et Burlington à quelque 300 000 voyageurs par année. Et il chiffre les gains en provenance du nord-est des États-Unis à... 300 000 voyageurs par année!

Les chiffres réels seraient-ils légèrement différents que cela ne changerait rien au fait qu'on ne parle pas d'exode dans le cas de l'aéroport Trudeau, qui a tout de même desservi 12 millions de passagers l'an dernier...

Doit-on s'attaquer au problème en réduisant les taxes et les frais de toutes sortes? À Montréal, rien n'indique que cela en vaut la chandelle. D'autant que les autorités n'ont aucun pouvoir sur la plupart des éléments qui favorisent le Vermont et l'État de New York: force du dollar canadien, proximité des Cantons-de-l'Est, hauteur de l'aide gouvernementale accordée aux aéroports américains, intensité de la compétition entre transporteurs au sud de la frontière, etc.

N'empêche, il serait toujours possible de faire pression sur Ottawa pour qu'il cesse de prendre les aéroports pour des vaches à lait, exigeant chaque année beaucoup plus en loyers et en frais de sûreté qu'il n'en réinvestit. Ce qui a un effet à la hausse sur le prix des billets d'avion.

Cela ne colmaterait pas la fuite constatée vers les États-Unis. Mais au moins, cela diminuerait la facture pour ceux qui continuent de privilégier les aéroports canadiens.

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