Le rattrapage salarial des médecins québécois est complété, a affirmé le ministre de la Santé Gaétan Barrette lundi. De fait, les médecins vont avoir du mal à nous convaincre qu'ils sont sous-payés par rapport à qui que ce soit. Hélas, le sujet n'est pas évacué pour autant. Au contraire, les comparaisons avec le reste du Canada seront encore une fois au coeur des négociations salariales qui s'amorcent. Et en l'absence d'évaluation indépendante, chacun va pouvoir continuer à dire n'importe quoi.

« J'en appelle à leur conscience sociale et, je dirais même, à leur gros bon sens », a déclaré le ministre en invitant les médecins à « mettre à jour » leur entente dans l'esprit qui prévalait il y a 10 ans - c'est-à-dire un rattrapage, et non un dépassement, de la moyenne canadienne.

Payer les médecins coûte 875 $ par habitant au Québec, comparativement à 970 $ en Ontario. Vu la différence de coût de la vie entre les deux provinces, la rémunération des médecins québécois a rattrapé celle de leurs homologues ontariens, considère le ministre. Si la tendance se maintient, elle risque même de la dépasser, dit-il.

Les syndicats de médecins, évidemment, ne voient pas l'affaire du même oeil.

Les augmentations prévues jusqu'en 2022 sont le résultat de la renégociation demandée par le ministre il y a deux ans, rappelle la Fédération des médecins spécialistes.

L'écart avec les médecins de famille ontariens est beaucoup plus important que ne le montrent ces chiffres, objecte la Fédération des médecins omnipraticiens.

Qu'en est-il exactement ? La vérité, c'est qu'on n'en sait rien. Et qu'après toutes ces années, c'est vraiment une honte.

Au moment de la dernière entente, en 2011, le fossé entre les estimations des uns et des autres était tel qu'on a décidé de régler ça en deux temps. D'abord, des augmentations substantielles. Ensuite, des comités paritaires pour mesurer enfin ces fichus écarts et l'état du rattrapage. Où en est-on cinq ans plus tard ? Au même point, c'est-à-dire nulle part. Les comités paritaires qui devaient plancher là-dessus n'ont jamais été créés, a révélé le Vérificateur général l'an dernier.

Résultat : on n'a toujours pas de source de données ni de formule de calcul qui fassent consensus.

L'étude que le ministre Barrette vient d'annoncer pour comparer la productivité des médecins québécois à celle de leurs confrères ontariens est intéressante, mais il faudrait aussi pouvoir comparer combien chacun est réellement payé pour son travail. Autrement, chacun va pouvoir continuer à prétendre que la balance penche plus ou moins d'un côté ou de l'autre, selon les chiffres qu'il utilise. Or, derrière ces chiffres, il y a des millions de dollars de différence que les contribuables québécois auront à payer, non pas pour recevoir plus de services mais pour les mêmes services. Avant de leur demander d'en rajouter, il faudrait être capable de leur dire où on en est exactement.

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