Dans un geste retentissant qui en a sonné plusieurs, les délégués présents au congrès du NPD fédéral à Edmonton ont montré la porte à leur chef Thomas Mulcair, hier, en votant à 52 % en faveur d'une course à la direction. Mais avant d'en arriver là, le parti devra s'interroger sur la façon dont il entend désormais influencer la politique canadienne.

Le parti a été aux portes du pouvoir, a rappelé hier l'ex-député Yvon Godin en évoquant les 103 sièges de 2011. Le résultat des dernières élections, qui a relégué la formation orangée au rang de deuxième opposition, n'en a été que plus frustrant. L'insatisfaction était palpable au sein du NPD, mais personne n'en avait vraiment mesuré l'ampleur avant le vote d'hier. 

Le parti n'a jamais pardonné cette défaite à son chef. Et au moins autant que le résultat, c'est la manière qui est restée en travers de la gorge : la façon dont la campagne a été menée, mais aussi ce que le NPD est devenu sous la direction de Thomas Mulcair. On s'est longtemps demandé si la greffe allait prendre entre cet ex-député du Parti libéral du Québec et le parti traditionnel de la gauche canadienne. 

Les déclarations enflammées entendues en fin de semaine montrent que l'enjeu est beaucoup plus profond. C'est de l'ADN du parti qu'il s'agit, et les tentatives de manipulations génétiques ne sont pas bienvenues.

Thomas Mulcair a eu beau évoquer le fantôme de Jack Layton à maintes reprises dans son discours, ces mentions ne lui ont pas valu des applaudissements aussi enthousiastes qu'on s'y serait attendu. Dans les corridors, c'est le nom d'un autre politicien, bien vivant celui-là, que plusieurs jeunes délégués avaient aux lèvres : l'Américain Bernie Sanders. 

Au-delà du candidat-de-74-ans-dont-la-montée-prend-tout-le-monde-par-surprise, c'est surtout l'idée d'un politicien ouvertement socialiste, dont le discours authentiquement progressiste a su rallier les moins de 30 ans, qui séduit ces néo-démocrates. Si la grogne des délégués de l'Ouest était escomptée, l'insatisfaction des jeunes semble avoir été sous-estimée.

Premier chef du NPD à se faire montrer la porte de cette manière, Thomas Mulcair était visiblement sous le choc hier. Il s'est néanmoins efforcé de garder la tête haute, offrant de tenir le fort jusqu'à l'arrivée de son successeur et appelant à l'unité du parti. À voir les réactions captées par les médias, ce ne sera pas facile.

Entre ceux qui ont appuyé le chef par conviction ou pour éviter une course, et ceux qui voulaient le voir partir pour des raisons parfois diamétralement opposées, les membres auront fort à faire pour en arriver à une identité et une orientation communes fortes.

Après le Parti conservateur qui, dans le cadre de sa course à la direction, se demande quelle droite incarner, voilà que le NPD doit se livrer au même exercice sur la gauche. Ces débats internes monopoliseront une grande partie de l'attention des deux principaux partis de l'opposition en 2016. Pour le gouvernement, c'est un répit inespéré. Pour la population qui compte sur l'opposition pour tenir le pouvoir à l'oeil, par contre, c'est loin d'être l'idéal.

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