La liquidation des Serres du Saint-Laurent, producteur des fameuses tomates Savoura, place le Québec à la croisée des chemins. Si l'on veut développer la culture maraîchère en serre, c'est le moment où jamais.

L'entreprise de Portneuf a réussi à bâtir un actif rare en agriculture: une marque forte, reconnue et reconnaissable entre toutes au rayon des fruits et légumes. Cette marque est aujourd'hui à vendre au plus offrant, tout comme les serres et autres actifs du groupe. Le syndic soumettra les meilleures propositions aux deux principaux créanciers garantis, la Banque Nationale et la Banque Royale. Céder la marque seule est donc exclu, pour éviter que les serres ne restent sur le carreau. C'est déjà ça.

Savoura risque cependant de passer dans le giron d'une entreprise hors Québec, qui l'utiliserait comme bon lui semble. Cette marque à forte connotation locale pourrait donc servir à mettre en valeur des légumes cueillis en Ontario ou ailleurs, concurrençant ainsi les produits québécois dans nos supermarchés. Quel gâchis!

Les acheteurs potentiels ont jusqu'à la fin du mois pour faire une offre. Québec doit réfléchir à l'avenir du secteur. Le ministre de l'Agriculture a dit espérer que des Québécois reprennent Savoura. Bravo, mais son gouvernement doit pousser la réflexion plus loin. Deux serristes d'ici, Productions horticoles Demers et Serres Sagami, ont manifesté leur intérêt. Va-t-on les appuyer s'ils font une offre? Et surtout, dans quelle optique?

La production maraîchère en serre n'est que l'ombre de ce qu'elle pourrait être. La centaine d'hectares exploités ici représente seulement 10% des superficies ontariennes. Il y aurait moyen d'en faire plus, à condition de s'en donner les moyens.

Les serristes, grands consommateurs d'énergie, rêvent de pouvoir acheter leur électricité au tarif L, réservé aux grandes industries. À environ 4 cents/kWh, leurs coûts d'éclairage et de chauffage s'en trouveraient grandement allégés. Québec a toujours fait la sourde oreille, mais avec une vingtaine d'années de surplus en perspective chez Hydro, la question est plus que jamais d'actualité.

Un tel tarif convaincrait les entreprises d'investir pour accroître leur production. Le secteur pourrait augmenter ses revenus de plus de 40% (120 millions) en cinq ans, en plus de créer des emplois en région, fait valoir le syndicat des producteurs

Évidemment, si les serriculteurs veulent gagner une plus grande place dans les paniers des Québécois, ils devront offrir une plus grande variété de légumes, et les offrir à prix concurrentiels. Une promotion de l'achat local nettement plus dynamique, comme cela se fait en Ontario, serait aussi de mise.

Le dossier mérite un examen sérieux et une réponse claire. Si le gouvernement Couillard ne croit pas au potentiel économique du secteur, qu'il le dise, car dans le contexte actuel, le silence et l'inaction seront aussi éloquents que n'importe quel refus.

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