Le logement devrait-il être l'aboutissement ou le point de départ des interventions auprès des sans-abri? La deuxième approche prévaut de plus en plus, et c'est tant mieux. Elle donne de meilleurs résultats, confirme une étude canadienne publiée mardi dans le Journal of the American Medical Association (JAMA).

«Devenir sobre est déjà difficile dans des conditions idéales, alors imaginez quand vous habitez sous une autoroute», résume la revue scientifique en éditorial.

La recherche publiée hier revient sur le projet pancanadien Chez Soi, qui a suivi plus de 2000 participants dans cinq grandes villes. Cette grande expérience a déjà fait l'objet de plusieurs rapports et articles. La présente étude porte sur près de 1200 itinérants atteints d'une maladie mentale grave, mais considérés comme ayant des besoins modérés.

Les participants ont été répartis aléatoirement en deux groupes. Les premiers, assignés à un programme de type Logement d'abord, ont été suivis par une équipe multidisciplinaire qui les a notamment aidés à trouver un appartement correspondant à leurs préférences. Les seconds ont eu droit aux services habituels. Après deux ans, la différence était flagrante. Les participants du premier groupe avaient passé beaucoup plus de temps en logement stable. À Montréal, par exemple, ils y ont passé en moyenne plus des trois quarts de la période étudiée, contre moins du tiers de la période pour les participants soumis au parcours habituel.

Cela peut sembler une évidence, puisque les premiers ont eu rapidement accès à un appartement. Ils avaient cependant un loyer à payer et, surtout, n'étaient pas obligés de rester. Pourtant, c'est ce que la plupart ont choisi de faire. Difficile, après cela de prétendre, comme certains le font encore, que les sans-abri sont dans la rue par choix. C'est l'exception plutôt que la norme.

Évidemment, les subventions au logement et les équipes de soutien ont un coût. Sauf que laisser des personnes avec des problèmes de santé mentale dans la rue finit aussi par coûter cher. À Montréal, Logement d'abord a coûté environ 14 000$ pour chacun de ces participants à besoins modérés. Chaque 100$ investis dans le programme ont toutefois permis d'économiser presque 72$ en hospitalisation, hébergement en refuges et autres services. Et c'est sans compter l'amélioration de la qualité de vie des principaux intéressés.

À première vue, le questionnaire utilisé dans l'étude du JAMA ne montre pas de différence significative entre les deux groupes. L'évaluation de certains critères, comme les loisirs et la sécurité, et les entrevues de suivi montrent toutefois des résultats très positifs pour les participants au programme. Outre la satisfaction exprimée, plusieurs ont réduit, ou carrément cessé, leur consommation d'alcool ou de drogue, et ce, même si le programme ne les y obligeait pas.

Le fédéral, qui avait financé le projet pancanadien, a décidé que 65% des fonds de sa Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance iront désormais à des initiatives de ce type dans les grandes villes. Ça ne fera pas disparaître tous les itinérants, mais on peut espérer qu'ils soient plus nombreux à se trouver enfin un vrai logis.

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