Investisseurs, ne laissez pas le cannabis altérer votre jugement. Les entreprises qui parlent de se lancer dans la marijuana médicale publient souvent des informations incomplètes et prêtant à confusion, signalent les gendarmes des valeurs mobilières.

L'Autorité des marchés financiers (AMF) québécoise et ses homologues de l'Ontario, de la Colombie-Britannique et de l'Alberta se sont intéressées à 62 sociétés qui avaient publicisé leur intention de s'attaquer au marché de la marijuana médicale. «Pour 40% d'entre eux, soit 25 émetteurs, le déséquilibre de l'information fournie (...) soulevait de sérieuses inquiétudes quant à la protection des investisseurs», lit-on dans un avis publié cette semaine.

La plupart de ces 25 entreprises étaient déjà inscrites à la Bourse de croissance TSX dans un autre domaine. Près des trois quarts étaient de petites sociétés minières, 16% appartenaient au secteur du pétrole et du gaz, des technologies ou de l'agriculture. Dans plusieurs cas, la seule évocation de la marijuana médicale a suffi à faire bondir leur titre.

Le hic, c'est que des renseignements essentiels sur les coûts, délais et incertitudes de l'aventure étaient passés sous silence, empêchant les investisseurs d'évaluer les risques. Les communiqués ne répondaient donc pas aux exigences des lois sur les valeurs mobilières auxquels étaient assujettis ces émetteurs. Presque tous ont dû revoir leur copie.

Le marché canadien de la marijuana thérapeutique a été créé de toutes pièces par le gouvernement Harper en interdisant aux particuliers de cultiver leurs propres plants. Selon ses estimations, près d'un demi-million de Canadiens pourraient avoir le droit de consommer du cannabis à des fins médicales d'ici 2024, générant des ventes de 1,3 milliard de dollars auprès des entreprises autorisées. Mais jusqu'ici, c'est plutôt Perrette et le pot au lait.

Avec l'injonction accordée en mars dernier, juste avant l'entrée en vigueur du nouveau cadre réglementaire, les Canadiens qui détiennent un permis de production pour eux-mêmes ou pour autrui peuvent continuer à faire pousser leur marijuana. Et la cause entendue en Cour fédérale à Vancouver cette semaine ira probablement jusqu'en Cour suprême. Le marché captif promis pourrait bien ne jamais se matérialiser.

Pour l'instant, à peine plus de 15 000 patients s'approvisionnent auprès des entreprises agréées. Et ne devient pas fournisseur autorisé qui veut. Santé Canada a reçu plus de 1200 demandes et en a rejeté la majorité. Quelque 320 sont encore à l'étude et seulement 26 permis ont été accordés. Les rares promoteurs jugés dignes de confiance devront disposer de capitaux considérables pour répondre aux normes de construction et de sécurité des bâtiments, et tenir le coup jusqu'à ce que leurs plants soient approuvés.

Bref, la seule chose que puisse garantir une entreprise qui envisage de se lancer dans la marijuana médicale en ce moment, c'est beaucoup d'incertitude.

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