Le plan d'action sur l'itinérance présenté hier par la ministre Lucie Charlebois n'est pas follement ambitieux, ni dans ses objectifs ni dans ses moyens, mais c'est vraiment un pas dans la bonne direction.

En proportions, le chiffre paraît bien. Les 4,6 millions de dollars annoncés hier à l'Accueil Bonneau représentent un ajout de 56% au financement annuel destiné à l'itinérance dans l'ensemble de la province, qui est de 8,1 millions de dollars par année. À cela s'ajouteront, cette année seulement, 2,1 millions pour diverses formations destinées à ceux qui interviennent auprès des personnes itinérantes. Et surtout, le plan dévoilé à l'Accueil Bonneau est cohérent avec la Politique nationale de lutte à l'itinérance présentée par le précédent gouvernement en février dernier.

Les sommes annoncées ne permettent cependant pas de donner suite à toutes les observations pertinentes de la Politique. Comme le signalent le Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM) et le Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), aucune somme n'est prévue pour bonifier le revenu des personnes seules, dont la vulnérabilité est clairement identifiée dans la Politique. Le plan d'action propose plutôt de les aider à obtenir toutes les prestations auxquelles elles ont droit et à accéder au marché du travail.

Sur le fond, toutefois, la décision de consacrer plus de ressources aux problèmes liés à l'itinérance ne peut être reçu autrement que comme une bonne nouvelle. D'autant qu'une bonne partie de ces sommes, tout comme la plupart des stratégies énoncées, ne visent pas seulement à adoucir la vie de ceux qui sont dans la rue, mais à les en sortir et à éviter que d'autres y atterrissent.

Nous n'avons pas eu le fin détail de la répartition des fonds hier. On nous dit cependant que 300 000$ iront à cinq établissements destinés aux femmes. Ce ne sera pas du luxe. Ces ressources débordent et doivent refuser de la clientèle beaucoup plus souvent que les autres, montre le premier portrait de l'itinérance publié vendredi dernier.

Le financement du Projet de réaffiliation en itinérance et santé mentale (PRISM) a aussi vu son financement sécurisé et légèrement bonifié. Le Projet, piloté par les psychiatres de rue montréalais Olivier Farmer et Lison Gagné, aide des sans-abri de longue date à faire la transition vers un véritable logis, avec des résultats impressionnants.

La ministre a promis un suivi à la mi-parcours et à la fin de son plan d'action de cinq ans. Ce sera déterminant. Même si la stratégie ne comporte pas d'objectifs chiffrés, il faut s'assurer qu'elle donne des résultats concrets. Il serait particulièrement intéressant de suivre le parcours des jeunes forcés de quitter des centres jeunesse à 18 ans. Combien aboutissent dans la rue, durant combien de temps et pourquoi? Ce ne sera peut-être pas très flatteur pour le système. Mais justement: devant un portrait cru la réalité, il devient gênant de ne pas en faire plus pour l'améliorer.

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