Autour d'un demi-million de dollars par «journée d'étude». C'est ce qu'il en coûtera à la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) pour ces moyens de pression qui ont empêché 3351 Québécois d'être opérés à la date prévue, en 2002 et 2003. La Cour suprême, en effet, vient de refuser d'entendre la cause. C'est donc le jugement rendu par la Cour d'appel en mars dernier qui prévaut.

La FMSQ s'en tire quand même à bon compte, car la Cour d'appel avait beaucoup diminué les montants accordés en Cour supérieure. Les dommages exemplaires de 2 millions ont été annulés. De plus, le nombre de patients admissibles aux dommages moraux et, donc, le montant associé, a pratiquement fondu des deux tiers. En tenant compte des intérêts et indemnités additionnelles qui ont couru depuis 11 ans, la facture atteindra environ 1,5 million.

Si le butin est un peu écorné, le message est intact: il y a des limites à prendre les patients en otage. Pour la majorité des travailleurs de la santé, c'est une évidence, puisque les syndicats des établissements ont l'obligation de maintenir des services essentiels. Les fédérations de médecins, qui sont aussi des syndicats, ne sont toutefois pas soumises à cette exigence.

Il faut donc remercier le Conseil pour la protection des malades d'avoir intenté ce recours collectif en 2003. La FMSQ, alors présidée par le défunt Yves Dugré, s'était dite «surprise» de l'initiative. Les journées d'étude, avait-elle soutenu, avaient servi à réfléchir à la qualité et à l'accessibilité des soins «pour le bien-être de tous les patients du Québec».

Le juge de première instance ne s'y est pas trompé. Ces trois jours où la Fédération a incité ses membres à s'absenter constituaient bel et bien un moyen de pression. Et ça n'était pas un motif valable pour manquer des rendez-vous.

La fronde de la FMSQ aura au moins convaincu les Québécois d'une chose: son pouvoir de perturbation est démesuré. En seulement trois jours, 10 420 chirurgies, consultations ou examens diagnostiques ont dû être reportés ou annulés.

Et n'oublions pas qu'après cet épisode, il y a eu celui de 2006. La FMSQ avait alors recommandé à ses membres de cesser toute formation non rémunérée, mettant en péril l'arrivée de la prochaine cohorte des médecins. Des obstétriciens-gynécologues avaient aussi menacé de ne pas renouveler leurs assurances, ce qui les aurait empêchés de procéder à des accouchements. Le Conseil des services essentiels avait coupé court à ces manoeuvres, mais la loi spéciale qui lui a permis d'intervenir a été révoquée. Il est donc heureux que les tribunaux aient mis un frein à ces abus.

Les hôpitaux aussi reportent des chirurgies, souvent en évoquant une urgence ou le manque de personnel. Ont-ils toujours des motifs valables de le faire, demande aujourd'hui la FMSQ. Le syndicat entend bien creuser la question. Ce sera à suivre.

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