Rob Ford, qui tient la plus grande ville canadienne en otage depuis près d'un an, a finalement quitté les lieux pour aller se faire soigner. On est stupéfait de la pression médiatique et policière qu'il a fallu appliquer pour lui faire lâcher prise.

La constance des médias mérite d'être soulignée. Malgré les attaques personnelles et les tentatives pour discréditer leur travail, ils ont accumulé les preuves sans se laisser intimider. On remarque qu'à part le site américain Gawker et quelques anonymes des réseaux sociaux, c'est la presse écrite qui a amené de l'eau au moulin - alors que cette eau était surtout constituée d'extraits de vidéos et d'enregistrement sonores.

Oui, il est dérangeant de voir que deux grands journaux ont payé des sources anonymes pour obtenir certaines de ces images. En particulier dans le cas du Globe and Mail, qui a reconnu cette semaine avoir donné 10 000 $ à un vendeur de drogue pour des photos extraites d'une vidéo. En même temps, il faut être honnête. Sans ces éléments concrets, Ford aurait pu continuer à nier l'évidence, et l'aurait sans doute fait. Au moment où vous lisez ces lignes, il tiendrait encore le siège au lieu d'avoir pris le chemin de la désintox.

A-t-on déjà oublié combien de faussetés lui et son frère Doug ont proférées après que le Toronto Star et Gawker aient signalé l'existence d'une première vidéo incriminante, à la mi-mai 2013 ? À les en croire, les médias avaient tout inventé et le maire n'avait jamais fumé de crack. Les autres vidéos et témoignages évoquant un Rob Ford en état d'ébriété dans des lieux publics ? Pure exagération, voyons !

Cette sinistre farce a duré près de six mois. Il a fallu, pour y mettre un frein, que la police s'en mêle, annonçant avoir saisi une vidéo correspondant à la description et accusant un ami de Ford d'extorsion pour avoir tenté de la récupérer. Sans cela, le maire n'aurait jamais avoué avoir fumé du crack, entretenant le doute sur les allégations des médias.

Et encore, ce revers cuisant n'a pas suffi à le convaincre de libérer l'hôtel de ville de sa présence. Le conseil municipal a réussi à limiter les dégâts en le dépouillant de presque tous ses pouvoirs, mais Rob Ford s'est accroché à son titre de maire. Il a continué à le déshonorer tout en faisant campagne pour sa réélection.

Ce n'est que mercredi soir dernier, après que deux journaux torontois aient fait état d'enregistrements tout frais, que le maire a enfin capitulé et pris congé pour se faire soigner.

On lui souhaite de se rétablir, mais on espère aussi que son absence sera suffisamment longue pour l'écarter de la course à la mairie. La dernière chose dont la métropole a besoin, c'est que Rob Ford se fasse réélire en jouant la carte du repentir. Il en a fait trop de tort à la Ville pour qu'on lui en confie de nouveau les clefs.

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