Oeil pour oeil, dent pour dent? Le syndicat des médecins de famille a beau s'en défendre, c'est l'impression qu'il donne en suggérant que ses membres puissent vendre des médicaments. Les pouvoirs de prescription accordés aux pharmaciens les exaspèrent, c'est évident. Mais en matière de santé, les Québécois n'ont plus de patience pour les querelles de juridiction.

La Fédération désire obtenir «le pouvoir pour tous les médecins omnipraticiens, de vendre les médicaments qu'ils prescrivent à leurs patients. Elle cherchera en conséquence à obtenir les modifications législatives et règlementaires appropriées», a indiqué récemment la Fédération des médecins omnipraticiens (FMOQ) au Registre des lobbyistes.

Vérification faite, la FMOQ n'a pas encore effectué de représentations à cet égard. Elle n'est même pas en mesure de nous dire quelle proportion de ses membres souhaite réellement vendre des médicaments. Elle veut d'abord les consulter et en reparler en conseil général au printemps, nous dit son porte-parole, Jean-Pierre Dion.

Le code de déontologie des médecins leur interdit de faire le commerce des médicaments qu'ils prescrivent. Plusieurs n'ont donc pas apprécié que les pharmaciens, eux, obtiennent le droit de prescrire des médicaments qu'ils vendent.

Les pharmaciens, on le sait, pourront bientôt prolonger et modifier des ordonnances existantes, et même prescrire certains traitements - des actes réservés jusqu'ici aux médecins.

Cette mesure vise à aider les malades souffrant de problèmes bénins qui ont difficilement, ou pas du tout, accès à un médecin. La population l'a accueillie avec enthousiasme.

Les médecins de famille devraient donc faire attention à la manière dont ils interviennent dans ce dossier. Ce n'est pas parce que leurs patients les apprécient qu'ils les appuient aveuglément. Et les Québécois qui ne trouvent pas de médecin prêt à les accepter comme patients, encore moins.

Beaucoup d'omnipraticiens disent craindre qu'un médicament prescrit à la pharmacie pour soulager un mal bénin retarde le diagnostic d'un problème grave. Inquiétude légitime, mais les gens qui n'ont pas de médecin, ou qui n'arrivent pas à le voir, courent déjà ce risque. Tant que ses membres ne seront pas capables de recevoir ces malades, la FMOQ sera mal venue de les empêcher d'aller voir ailleurs.

Le risque de conflit d'intérêts quand le prescripteur du médicament en est aussi le vendeur est bien réel lui aussi. Mais y exposer les médecins, en plus des pharmaciens, ne réduira en rien ce risque, au contraire.

Le règlement visant les pharmaciens est actuellement en consultation. Leurs nouvelles pratiques feront également l'objet d'un suivi par un comité de vigie. Si les médecins de famille se soucient vraiment des malades, qu'ils fassent des recommandations pour bonifier ces deux mécanismes.

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