Il a failli y avoir un mort sur le premier chantier du CHUM. Le consortium responsable de la construction du centre de recherche et un de ses sous-traitants n'ont pas pris les précautions nécessaires, conclut la CSST dans son rapport d'enquête rendu public hier. Pour un établissement de santé de pointe, ce n'est pas très glorieux.

Le 12 janvier dernier, Constructions LJP défait une toile au 15e étage du chantier du Centre de recherche du CHUM. Un bloc de glace s'en détache et tombe sur la tête de Serge Provost, vitrier qui s'affaire sur une plate-forme 11 étages plus bas.

Le travailleur restera presque deux semaines dans le coma. Son état sera jugé si désespéré qu'il passera à un cheveu d'être débranché. Heureusement, il ouvrira les yeux in extremis.

M. Provost n'est pas tiré d'affaire pour autant. Malgré la longue réadaptation qui l'attend, il ne pourra peut-être plus jamais exercer son métier. Il a des troubles de mémoire, d'équilibre, de vision et d'ouïe... entre autres. Le bloc de glace de près de 3 kg a frappé son casque de construction à plus de 100 km/h. Que M. Prévost soit encore en vie dépasse l'entendement.

Mais ce qui n'a vraiment aucun sens, c'est qu'on puisse encore, en 2012, perdre la vie en travaillant à la construction d'un centre de recherche destiné à repousser les limites de la maladie et de la mort.

D'autant que cette tragédie était évitable. Avant d'entreprendre des travaux superposés, il faut établir un périmètre de sécurité, indique le programme de prévention du Consortium Pomerleau-Verreault. Le sous-traitant LJP n'a pas jugé bon de le faire, car l'enlèvement des toiles ne comportait pas, selon lui, de risque de chute d'objets.

La glace n'était peut-être pas prévisible. Par contre, l'installation des toiles nécessite des clous, des marteaux et des pièces de bois qui pourraient tomber et, donc, requièrent un périmètre de sécurité, indique la CSST. Ceci aurait pu éviter cela. Hélas, personne n'a tenu compte de ce risque.

Des correctifs ont été apportés depuis, et l'on espère qu'ils seront appliqués ailleurs. Il faut apprendre de ses erreurs. Mais on ne peut pas faire toutes les erreurs. La forme de prévention la plus efficace est encore de faire passer la sécurité avant tout autre considération. Ce n'est malheureusement pas ce qui prévaut dans la construction.

On aurait pu faire du CHUM un chantier modèle, qui se serait distingué par son taux infinitésimal d'accidents. Un chantier qui n'aurait pas fourni de travail aux hôpitaux ni à la CSST. Il n'en a jamais été question. La priorité, comme toujours, c'est de respecter les coûts et les délais. En se souciant de la sécurité, évidemment. Mais ce n'est pas en fonction de ça qu'on mesurera la réussite du projet ni qu'on paiera les entrepreneurs.

Alors chacun fait de son mieux. Ce qui, on le voit, n'est pas la même chose que de faire tout ce qui est possible et imaginable.

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