Les pénuries de médicaments font désormais partie de l'équation. Les systèmes de santé doivent apprendre à composer avec ce problème récurrent.

Les ratés de l'usine Sandoz, à Boucherville, ont attiré l'attention sur le problème. Ce qui est un peu paradoxal, car plusieurs des événements qui ont perturbé la production de cette usine, dont un incendie et une erreur d'étiquetage, sont arrivés sans prévenir. Ce qui n'est pas toujours le cas des ruptures de stock avec lesquelles les professionnels de la santé doivent composer depuis des années. Des ruptures dont les effets et la durée dépassent aujourd'hui «tout entendement», notait récemment un comité de travail piloté par l'Ordre des pharmaciens du Québec.

Des opérations reportées. Des médecins et des pharmaciens qui perdent un temps fou à chercher les produits dont leurs patients ont besoin ou, à défaut, des solutions de remplacement, qui ont parfois des effets indésirables. Des patients qui écopent. Des problèmes qui sont souvent aggravés par l'absence de préavis, soulignait l'Agence canadienne des médicaments il y a déjà un an.

C'est l'une des plus graves lacunes des contrats d'approvisionnement actuels: les fabricants n'ont pas l'obligation de donner de tels préavis, ni même d'incitatifs à le faire. Le comité de travail de l'Ordre des pharmaciens recommande plusieurs changements. Les entreprises qui veulent arrêter la production d'un médicament ou fermer une usine devraient d'abord obtenir l'aval des autorités, comme cela se fait dans d'autres pays. Si les risques sont jugés trop grands, le geste pourrait être retardé ou annulé. Par ailleurs, les contrats des regroupements d'achats de médicaments devraient toujours inclure des incitatifs visant à éviter les ruptures, et des pénalités significatives lorsqu'elles surviennent.

Même si les plus gros contrats d'approvisionnement relèvent des provinces, le fédéral ne doit pas les abandonner à leur sort. De la même façon qu'Ottawa vérifie l'innocuité des médicaments vendus ici, il devrait aussi imposer des exigences minimales en matière d'approvisionnement. Il faut rééquilibrer la donne de façon à ce que les pénuries n'aient pas seulement des conséquences négatives pour le client (le système de santé et les patients), mais aussi pour le fournisseur. C'est la seule façon d'inciter les fabricants à tout faire pour éviter les ruptures ou, lorsqu'elles sont inévitables, pour en minimiser les impacts. C'est ce que n'importe quel fournisseur devrait faire en principe. Mais rien de tel qu'un contrat bien rédigé pour lui rafraîchir la mémoire.

Évidemment, tout se négocie. Les provinces ont tout misé sur les bas prix, ce qui les a poussées vers des pratiques à risque, comme faire affaire avec des fournisseurs uniques, et ne leur a pas laissé beaucoup de marge pour d'autres exigences. Si elles veulent s'assurer un approvisionnement plus sécuritaire, elles vont devoir ajuster leur stratégie.

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