Le rapport de la Commission nationale sur les causes de la crise financière et économique aux États-Unis, rendu public jeudi, confirme beaucoup d'éléments connus. Ce qui ne lui enlève rien de sa valeur, au contraire. Cette brique abondamment documentée est une police d'assurance contre tous ceux qui tenteront de réécrire l'histoire.

Le rapport de la Commission nationale sur les causes de la crise financière et économique aux États-Unis, rendu public jeudi, confirme beaucoup d'éléments connus. Ce qui ne lui enlève rien de sa valeur, au contraire. Cette brique abondamment documentée est une police d'assurance contre tous ceux qui tenteront de réécrire l'histoire.

«Cette crise financière était évitable.» La première conclusion de la commission créée par le Congrès américain est aussi la plus importante. Elle cloue le bec à tous ceux qui entretiennent l'idée que la débâcle de septembre 2008 est une espèce de catastrophe naturelle impossible à prévoir. S'il est vrai que le moment exact et l'ampleur du cataclysme auraient difficilement pu être prédits, il faut aussi admettre qu'on a ignoré les signaux inquiétants.  

La détérioration du marché hypothécaire résidentiel était évidente bien avant la crise. Au milieu des années 2000, près d'un emprunteur sur 10 prenait l'option ARM, qui lui permettait de faire des paiements si minimes que son capital restant dû augmentait. La proportion d'acheteurs en défaut de paiement quelques mois après avoir contracté leur prêt a pratiquement doublé entre 2006 et 2007.  

Et pourtant, le secteur financier affichait un appétit insatiable pour les titres adossés à ces créances de plus en plus fragiles. La complaisance des agences de notation et la titrisation ont faussé la perception des risques, mais le milieu a aussi contribué activement à sa chute.

Les structures de rémunération incitaient à augmenter les risques et l'effet de levier, c'est vrai. Ils ne rendaient cependant pas aveugle. Les témoignages et la correspondance cités dans ce rapport l'établissent hors de tout doute: plusieurs personnages de cette tragédie financière étaient conscients, dans certains cas atterrés, des dangers de leurs pratiques.

Les autorités financières passent aussi un sale quart d'heure. Trente ans de déréglementation et d'autorégulation n'excusent pas tout, conclut la Commission. «(Les autorités) avaient amplement de pouvoirs dans plusieurs domaines et ils ont choisi de ne pas les exercer», dénoncent les auteurs.

Les membres de la Commission nommés par les républicains (quatre sur 10) se sont inscrits en faux. Ils rejettent la thèse du manque d'encadrement réglementaire, et plusieurs conclusions du rapport. Pourtant, leur dissidence n'altère en rien la portée du document, qui tient davantage à la reconstitution minutieuse des événements qu'à leur interprétation. Les millions de pages et les quelque 700 témoignages recueillis dans le cadre de cette enquête ont une valeur inestimable. Les faits et les responsabilités que tant de gens se sont employés à ignorer avant la crise sont désormais impossibles à nier.

Le chapitre n'est pas clos pour autant. Comme le signalait une firme de consultants au forum économique de Davos cette semaine, plusieurs des risques présents avant et durant la crise sont encore là. Va-t-on continuer à les ignorer?

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