L'étude Interphone, publiée ce matin dans l'International Journal of Epidemiology, est la plus vaste recherche jamais réalisée sur les liens entre cellulaire et cancer du cerveau. On en connaît déjà le résultat: rien ne permet de conclure que l'usage de ces téléphones augmente le risque de développer une tumeur.

L'étude Interphone, publiée ce matin dans l'International Journal of Epidemiology, est la plus vaste recherche jamais réalisée sur les liens entre cellulaire et cancer du cerveau. On en connaît déjà le résultat: rien ne permet de conclure que l'usage de ces téléphones augmente le risque de développer une tumeur.

L'épidémiologiste montréalais Jack Siemiatycki, qui a participé à l'étude, n'avait donc pas de révélations fracassantes à faire hier. Mais il lance un cri d'alarme : les contraintes imposées par les comités d'éthique menacent la fiabilité de ce genre de recherches. Un appel qui mérite d'être entendu.

Les trois quarts des ménages canadiens ont accès à un cellulaire. Ça fait beaucoup de gens qui se demandent à quoi ils s'exposent en portant cet appareil à leur oreille. Et pourtant, le professeur Siemiatycki n'a jamais eu autant de difficulté à recruter des participants. «Les règles éthiques sont maintenant si rigides que les chercheurs du Canada, des États-Unis et d'Europe n'ont plus le type d'accès aux bases de données médicales et aux sujets de recherche dont ils auraient besoin», dénonce le scientifique rattaché au Centre de recherche du CHUM et à l'Université de Montréal.

Dans le cadre de l'étude Interphone, plus de 5000 patients atteints d'une tumeur au cerveau, en plus des sujets témoins, ont été interrogés dans 13 pays. Un échantillon qui aurait été bien plus représentatif si les taux de participation avaient été moins faibles - entre 53% et 78% selon les groupes. De telles proportions soulèvent la possibilité d'un biais de sélection, admettent les auteurs. Ils pointent du doigt les exigences des comités d'éthique, mais aussi la réticence croissante de la population à participer à des questionnaires d'études.

Sauf que ceci explique en partie cela. Par exemple, les comités d'éthique exigent de plus en plus que ce soient les médecins traitants qui recrutent les malades. Faut-il s'étonner que ces professionnels débordés, dont la mission est d'abord de soigner leurs patients, ne soient pas aussi convaincants que les épidémiologistes responsables de l'étude ? L'idée n'est évidemment pas de tordre le bras des malades. Mais on devrait s'assurer qu'ils comprennent à quel point leur contribution est importante dans l'avancement de la science.

Avec les exigences actuelles, notamment en matière de confidentialité, les études qui ont démontré les dangers du tabac et de l'amiante seraient impossibles à réaliser aujourd'hui, souligne le professeur Siemiatycki. C'est très inquiétant.

Les recherches sur le cellulaire vont devoir se poursuivre, notamment auprès des grands utilisateurs. Mais si l'on veut qu'elles nous donnent l'heure juste, il faudra tout mettre en oeuvre pour susciter, et non décourager la participation de la population.

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