«Plus de 170 000 Canadiens apprendront qu'ils ont un cancer cette année. Un sur deux n'y survivra pas.» Voilà une phrase que vous ne lirez pas souvent. Lorsqu'il est question de cancer, les grands médias ont beaucoup plus tendance à parler de guérison que de décès. Même les effets secondaires des traitements sont passés sous silence. Une distorsion de la réalité qui nuit aux malades et à leurs proches, dénonce un article publié cette semaine dans la revue scientifique Archives of Internal Medicine.

Environ la moitié des patients qui ont le cancer mourront de cette maladie ou de complications qui en découlent, soulignent les auteurs. Pourtant, la couverture des journaux et des magazines à grand tirage brossent un tout autre portrait. Des 436 articles traitant du cancer que ces chercheurs américains ont analysés, à peine 10% parlaient de patients morts ou mourant de cette maladie. Les papiers évoquant des cas de survie et de guérison étaient trois fois plus nombreux.

La description des traitements contre le cancer est aussi très édulcorée. Moins d'un reportage sur trois évoquait la possibilité d'effets indésirables comme la douleur, la nausée, la perte de cheveux ou l'affaiblissement. Moins d'un sur sept mentionnait que les traitements peuvent ne pas fonctionner ou que certains cancers peuvent être incurables. En outre, seulement 3% des textes parlaient de soins palliatifs ou de traitements de fin de vie.

Les articles étudiés ont été publiés dans de grands magazines et journaux américains, comme le Newsweek et le New York Times, mais un échantillon canadien mènerait probablement aux mêmes constats. C'est très préoccupant.

«Il est important que les patients atteints de cancer soient au courant des soins palliatifs et de fin de vie parce que cette information peut les aider à prendre des décisions réalistes par rapport à l'issue de leur maladie et aux risques et avantages des traitements, soulignent les chercheurs. Une information irréaliste peut induire le public en erreur.»

Heureusement, ce ne sont pas les sources qui manquent sur le web. Mais tant qu'on n'est pas soi-même touché par le cancer, directement ou à cause d'un proche, on cherche rarement des détails précis. La réaction du patient qui reçoit un diagnostic, et les décisions qu'il prendra, risquent fort d'être influencées par le discours ambiant sur la maladie.

À cet égard, la couverture des grands médias reflète, bien plus qu'elle ne dicte, la perception que la société a du cancer, et de la mort en général. Cette étude nous interpelle donc collectivement.

Le cancer est une pathologie. On en a fait une épreuve dont on triomphe à force de volonté. Quelle pression pour tous ceux qui rechutent ou apprennent qu'il n'y a plus d'espoir ! Quelle responsabilité démesurée! Il y a lieu de se demander si la vision que nous entretenons de cette maladie ne la rend pas encore plus douloureuse pour ceux qui en souffrent et pour leurs proches.

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