«L'internet permet maintenant aux vendeurs et aux acheteurs de maisons de faire une plus grande partie du travail eux-mêmes et d'empocher les économies.» Vu du Canada, le site créé par le département américain de la Justice est surréaliste. La division antitrust y fait une intense promotion du courtage non traditionnel, grâce auquel «les consommateurs peuvent économiser des milliers de dollars en commissions».

Même s'il le voulait, le Bureau canadien de la concurrence ne pourrait pas ouvrir un site équivalent: les services que vante son homologue américain n'existent pas ici. Une situation que le Bureau veut corriger, en s'attaquant à certaines règles du secteur. C'est un début. Mais il y aurait beaucoup plus à faire pour rendre l'offre de services immobiliers aussi variée et attrayante qu'aux États-Unis.

 

Le marché américain ne s'est pas amélioré par magie. Les autorités antitrust se sont battues durant des années contre les associations et les chambres immobilières, très habiles à adopter des règles bloquant l'innovation. C'est la démarche que vient d'entreprendre Ottawa, en amenant l'Association canadienne de l'immeuble (ACI) devant le Tribunal de la concurrence.

Au coeur du litige, le fameux système MLS, utilisé par les agents et courtiers membres de l'ACI pour enregistrer et consulter l'information sur les propriétés à vendre. Un particulier qui voudrait seulement y faire inscrire sa maison et «faire une plus grande partie du travail lui-même» n'a pas accès à un tel service de base. Il doit acheter un forfait plus étoffé, et plus coûteux. L'ACI plaide qu'elle fera bientôt changer cette règle par ses membres. Le problème, c'est que les chambres immobilières locales conserveront le droit d'imposer des restrictions. C'est loin d'être satisfaisant.

Beaucoup d'agents s'indignent qu'un organisme gouvernemental s'ingère dans un système privé, qu'ils financent de leur poche. Comment faire autrement? MLS a une telle emprise sur le marché qu'il est désormais impossible de créer un système qui lui ferait vraiment concurrence. L'ACI peut donc dicter la façon dont sont vendues 90% des résidences au pays. Et empêcher ses membres d'offrir certains forfaits qui répondraient pourtant aux besoins des consommateurs. C'est inadmissible.

L'autre aspect qu'il est temps d'améliorer, c'est la quantité d'informations que les agents peuvent afficher sur leurs sites à propos des propriétés inscrites dans MLS. Aux États-Unis par exemple, les firmes peuvent indiquer la valeur des transactions antérieures, autant pour la propriété affichée que pour celles de son quartier, pourvu que les données soient disponibles dans un registre public. Une foule d'autres renseignements sont visibles en ligne, sans qu'il soit nécessaire de téléphoner à un agent. Y a-t-il des règles qui empêchent de faire la même chose ici? Si c'est le cas, il est urgent que le Bureau de la concurrence s'en mêle.

akrol@lapresse.ca

 

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