Québec et Ottawa veulent serrer la vis aux criminels à cravate. Mais il faut avoir les bons outils, et s'en servir.

Les ministres québécois de la Justice, des Finances et de la Sécurité publique ont annoncé des mesures pour lutter contre la fraude, dimanche. Le ministre fédéral de la Justice a renchéri mardi, promettant de punir plus sévèrement les escrocs.

 

La réponse du gouvernement Harper en a sans doute réjoui plusieurs. Mais elle surestime l'efficacité du châtiment. La perspective de passer plus de temps en prison découragera peut-être quelques vocations d'arnaqueurs. Mais pour la plupart des individus tentés par cette forme de vol, l'attrait du gain facile éclipse toute autre considération. Ce qui inquiète les fraudeurs, ce ne sont pas les peines auxquelles ils s'exposent, mais les risques de se faire prendre. Il est là, l'effet dissuasif. Le gain perd de son attrait à mesure qu'il gagne en difficulté. C'est ce qui explique que les banques soient si rarement la cible de hold-up de nos jours.

Il y a plusieurs façons de rendre les fraudes moins attrayantes. Il ne faut en négliger aucune. Nous avons maintes fois exprimé notre soutien à l'égard des investisseurs de Norbourg, qui avaient toutes les raisons de croire que leur argent était bien géré. Nous sommes toutefois incapables de nous apitoyer sur les victimes de stratagèmes comme celui qui vient d'être découvert en Alberta. Personne n'est obligé de confier son argent à des inconnus qui promettent 35% à 40% dans des placements offshore. Quand on prend un risque aussi élevé, on ne peut pas nier sa part de responsabilité.

Cela dit, il y a des limites à sensibiliser les épargnants. Certaines fraudes sont tellement sophistiquées qu'il faut des spécialistes pour les détecter. Québec vient de faire un effort en ce sens en créant une escouade mixte intégrant des experts de la SQ, de l'AMF (Autorité des marchés financiers) et des procureurs, avec le mandat d'ouvrir plus d'enquêtes sur les crimes financiers. L'AMF a aussi décidé de mieux surveiller l'internet et diverses publications où de pseudo-conseillers racolent en toute impunité. Les mailles du filet se resserrent. On aurait aimé voir un effort semblable à Ottawa - un renforcement du service d'enquêtes économiques de la GRC, par exemple. Malheureusement, le gouvernement Harper considère avoir faire le nécessaire dans son budget... d'il y a deux ans.

Québec et Ottawa envoient des signaux, mais il en faudra plus pour dissuader des fraudeurs. Il faudra des résultats. Des arrestations. Des enquêtes et des procès menés rondement. À plusieurs reprises. C'est à partir de là seulement que les peines purgées pourront avoir un impact.

Parler de ses outils en conférence de presse ne suffit pas. Si on veut vraiment serrer la vis, il faut s'assurer qu'ils servent tous les jours, sans relâche. Même quand les caméras regardent ailleurs.

 

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