L'ambitieux projet de dossier informatisé du ministère de la Santé est mal parti. Il n'a pas encore défoncé ses budgets ni ses échéanciers, mais il est en bonne voie de le faire, prévient le vérificateur général.

Le dossier santé du Québec (DSQ) doit permettre aux médecins et à d'autres professionnels de la santé d'accéder à des informations importantes sur le patient - médicaments prescrits, tests de labo, etc. Ainsi, on économisera du temps, on facilitera les diagnostics et les traitements, on réduira les risques d'erreurs et on évitera des dédoublements. Formidable. Mais pour ce faire, il faut installer un gigantesque système capable de partager les données dans tout le Québec. Et ça, ça risque de prendre beaucoup plus de temps, et de coûter pas mal plus cher qu'on le pensait au départ. L'ennui, c'est que personne ne peut dire combien.

C'est la deuxième fois en moins de deux ans que le vérificateur examine ce projet. La moitié des recommandations formulées en mars 2008 n'ont pas été suivies de façon satisfaisante, signale-t-il dans son nouveau rapport, rendu public jeudi.

Le gouvernement québécois pensait finir de déployer le système l'an prochain, moyennant 563 millions. Il a repoussé l'échéance en juin 2011, mais n'a pas ajusté le budget. D'ailleurs, même la nouvelle date de livraison paraît irréaliste. Les projections du ministère de la Santé tablent sur une implantation débutant cette année, alors que le projet pilote ne sera même pas terminé. Celui-ci poursuit jusqu'à la fin mars 2010... s'il n'est pas prolongé de nouveau. Prenez le temps nécessaire pour roder la machine, mais ajustez vos projections en conséquence.

La facture totale n'est pas plus précise. D'une somme de 563 millions, en attente de révision, il faut ajouter les investissements préalables (327 millions, à revoir également) et les coûts récurrents du système, qui restent à évaluer (jusqu'à 85 millions par an).

Ottawa s'est engagé pour 303 millions et Québec ramassera le reste de la note. D'où l'intérêt d'avoir l'heure juste, aussitôt que possible. Ça ne sera pas agréable à entendre, mais ça mettra une saine pression sur les responsables du projet. Car les contrôles aussi ont besoin d'un tour de vis. «Plusieurs contrats signés ne figurent pas dans le portrait et doivent être ajoutés. Enfin, certaines données sont manquantes, notamment en ce qui concerne les montants», signale le vérificateur. Pas exactement des détails.

Tout n'est pas négatif dans ce rapport. Mais le flou qu'il signale est inquiétant. Le DSQ est une entreprise pharaonique qui intègre une douzaine de projets. Tous sont en retard - jusqu'à trois ans dans certains cas. Ces délais font grimper l'addition. Surtout que ce sont en majorité des consultants externes qui gèrent les projets: le compteur tourne. Et on ne sait même pas si les provisions pour dépassements de coûts sont suffisantes.

Le Ministère a accepté toutes les recommandations du rapport et promis de mettre ses prévisions à jour dans son budget annuel. C'est encourageant, mais le vérificateur doit continuer à suivre le projet de près. Car le potentiel de dérapage est énorme.

akrol@lapresse.ca

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