Vous renouvelez votre permis de conduire, vous demandez un extrait de naissance, vous achetez un permis de pêche. Savez-vous à quoi sert l'argent que vous déboursez pour ces documents? Ne cherchez pas, l'État lui-même l'ignore.

La ministre Jérôme-Forget a préparé le terrain. Dans un peu plus d'un an et demi, le 1er janvier 2011, un nombre important de tarifs gouvernementaux seront augmentés afin de refléter la hausse du coût de la vie, a-t-elle annoncé dans son budget. La mesure suscite de vives réactions, mais elle n'est que la partie visible de l'iceberg.

 

Québec se lance dans une vaste enquête administrative afin de déterminer combien lui coûtent ses services, et quelle portion est couverte par les frais facturés aux citoyens et aux entreprises. Bravo, c'est un exercice de réalisme qui aurait dû être fait depuis longtemps.

Cependant, ne nous faisons pas d'illusions. Les sommes que l'État pourra ainsi récupérer seront relativement minimes. Et il faudra ouvrir l'oeil. Les tarifs doivent servir à refléter les services aux usagers, et non à subventionner l'inefficacité gouvernementale.

Les tarifs imposés par Québec rapportent près de 23 milliards de dollars par an. Pourtant, des centaines d'entre eux ne sont pas indexés au coût de la vie. Certains n'ont pas bougé depuis le milieu des années 90. Cela dit, les revenus supplémentaires que l'État peut aller chercher là sont assez limités. De ces 23 milliards, près de la moitié provient d'Hydro-Québec, dont les tarifs sont régulièrement augmentés. Une autre partie de ces revenus vient des cotisations à des programmes qui sont déjà obligés de couvrir leurs coûts, comme la SAAQ et la CSST. Les fameux tarifs non indexés dont la ministre promet de s'occuper représentent environ 3 milliards de revenus, soit moins de 15% des sommes totales tirées de la tarification.

C'est une marge de manoeuvre assez mince, d'autant que l'État n'a pas beaucoup de prise sur le rendement de certains tarifs. Les revenus des droits de coupe, qui sont pourtant indexés, ont fondu de 13% en deux ans, et on s'attend à un autre recul pour l'année qui se termine. Au bout du compte, le dépoussiérage des tarifs devrait amener environ 60 millions de plus par an dans les coffres de l'État. De l'aveu même du ministère des Finances, ce n'est pas avec ça qu'on va réussir à rembourser le déficit!

La démarche entreprise par Québec ouvre aussi la porte à la création de nouveaux tarifs. Les ministères et organismes publics doivent en effet dresser «la liste des services qui ne sont pas tarifés et qui pourraient l'être» d'ici deux ans. Le but de l'exercice n'est pas d'imposer de nouveaux frais, jurent la ministre des Finances et ses fonctionnaires. Mais la politique de financement des services publics permettra aux prochaines administrations de le faire.

Après des années de gel irrationnel, il faudrait voir à ne pas tomber dans l'excès inverse en refilant des frais disproportionnés aux utilisateurs. Les entreprises sont forcées de contrôler leurs coûts, car la concurrence limite les prix qu'elles peuvent facturer pour leurs services. L'État doit trouver des mécanismes pour s'imposer la même discipline.

 

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