La violence et l'ampleur de la tornade qui a frappé les marchés à la fin de 2008 nous ont tous pris par surprise. Les crises financières, pourtant, ne sont pas rares. Au contraire, elles se multiplient depuis 20 ans, démontre le journaliste américain Michael Lewis dans son essai Panic, paru au plus fort de la crise bancaire. C'est à se demander pourquoi nous tombons dans le panneau à chaque fois.

Le krach boursier de 1987. La crise asiatique de 1998. La bulle techno. Celle de l'immobilier. «Ces événements extrêmes sont comprimés dans une période extraordinairement brève de l'histoire financière», souligne Michael Lewis, qui a vécu le krach de 87 en direct chez Salomon Brothers. Panic, qui rassemble une cinquantaine d'articles et d'extraits de livres publiés depuis 20 ans, passe chacune de ces crises aux rayons X.

 

Les parallèles sont fascinants. On sait, depuis le krach de 1929, que quand tout le monde et son beau-frère se mettent à «jouer» en Bourse, la catastrophe est imminente. Et lorsqu'on relit l'histoire qu'a publiée le magazine Time sur la frénésie du courtage à escompte, en juillet 87, on s'étonne un peu moins du Lundi Noir survenu moins de trois mois plus tard. Des signes inquiétants, il y en a toujours. Mais rares sont ceux qui veulent les voir. Souvenez-vous des technos: il ne faut pas regarder les résultats financiers, mais les perspectives de croissance, répétaient les analystes. Puis la bulle a éclaté. On se serait crû vaccinés contre les théories voulant que les règles habituelles ne tiennent plus. Pourtant, lorsque des économistes ont signalé que les prix des maisons avaient atteint des niveaux délirants par rapport aux revenus des ménages, il n'y a pas eu grand monde pour les écouter.

Aujourd'hui, l'heure est aux remises en question. George W. Bush a renié sa vision non interventionniste de l'État. Nicolas Sarkozy, qui n'est pas exactement à gauche, veut refonder le capitalisme. Le monde est en train de changer, affirment les critiques de longue date du système. Ils risquent d'être déçus. Les lendemains de bulles ressemblent au lendemain de brosses: on aspire à un idéal de pureté qu'on s'empressera d'oublier une fois rétabli. En 1987, le New York Times annonçait la fin des yuppies et de leur matérialisme outrancier. On connaît la suite. Seule l'expression s'est démodée. Les valeurs, elles, sont revenues en force dans les années 90 et 2000.

«La nation terrassée par la récession réclame une autre bulle», titrait la publication satirique The Onion en juillet dernier. Ils ironisent à peine. Si nous voguons d'une crise financière à l'autre, c'est beaucoup parce que nous sommes accros à l'euphorie boursière. Le boom qui devrait nous mettre la puce à l'oreille nous rassure comme un retour à la normale. Et quand nous nous réveillons avec la gueule de bois, nous nous empressons de nous préparer un autre drink.

L'année 2009 sera celle de l'analyse rétrospective. Les experts vont chercher des coupables, essayer de comprendre ce qui s'est passé, proposer des changements réglementaires. C'est ce qui se fait chaque fois. Mais tant qu'on ne s'interrogera pas sur notre addiction aux bulles financières, on ne réglera rien du tout. On préparera simplement le terrain pour la prochaine crise.





 

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