On dit qu'une « vague orange » a balayé l'Alberta, alors que le NPD a remporté les élections provinciales tenues mardi. Il serait plus juste de parler d'une « vague Rachel ». Car les Albertains ont davantage voté pour la sympathique chef néo-démocrate de la province, Rachel Notley, que pour les idées du parti social-démocrate.

Les électeurs de la province pétrolière cherchaient depuis quelques années une solution de rechange aux conservateurs, au pouvoir depuis quatre décennies. La campagne sincère, positive et rassurante de madame Notley - à l'image de celle de Jack Layton en 2011 - les a séduits.

La défaite du Parti progressiste-conservateur est cuisante. La formation a été reléguée au troisième rang, derrière le Wildrose, parti de droite donné pour mort il y a quelques semaines à peine. Ancien ministre vedette du gouvernement Harper, Jim Prentice semblait imbattable après son retour à la politique provinciale. Surtout qu'en décembre, il avait accueilli dans son caucus 11 des 16 députés du Wildrose, dont la chef Danielle Smith. Son parti avait désormais le contrôle quasi total de l'Assemblée législative.

Ont-ils été victimes d'un excès de confiance ? Les conservateurs se sont mis à commettre bourde sur bourde. Confronté à la chute des prix du pétrole, le gouvernement a présenté un budget imposant aux contribuables plusieurs hausses de taxes et de tarifs. Seules les entreprises étaient épargnées. Par ce choix, M. Prentice a renforcé la perception selon laquelle il était plus proche du milieu des affaires que des gens ordinaires. Cette perception a été confirmée quand il a déclaré que, s'ils voulaient savoir pourquoi les finances de la province étaient mal en point, les Albertains n'avaient qu'à « se regarder dans le miroir ».

Faisant fi de la loi sur les élections à date fixe, M. Prentice a appelé les électeurs aux urnes, voulant profiter du désarroi des partis d'opposition. La manoeuvre a choqué l'électorat. Dès le début de la campagne, les intentions de vote en faveur du NPD et du Wildrose se sont mises à grimper. Lequel s'imposerait comme alternative aux bleus ? L'excellente performance de Rachel Notley lors du débat des chefs a tranché la question : dès lors, la montée du NPD s'est accélérée et consolidée.

Les néo-démocrates ne devront pas se méprendre sur la nature du mandat que leur a confié la population albertaine. Celle-ci ne leur pardonnerait pas de privilégier l'idéologie au pragmatisme. Ce n'est d'ailleurs pas ce que la campagne de Mme Notley a laissé présager.

Il est heureux que la prochaine première ministre de l'Alberta ait manifesté la volonté « d'assumer le rôle de leader dans la lutte aux changements climatiques ». Cependant, le NPD n'a jamais expliqué comment cette intention se concrétisera. C'est là l'un des nombreux défis que devront relever Rachel Notley et son équipe. Le pays entier a intérêt à ce qu'ils réussissent.