Le maire de Montréal et l'Union des municipalités du Québec ont uni leurs voix la semaine dernière pour exiger un moratoire sur l'installation de boîtes postales communautaires. M. Coderre a parlé d'«improvisation complète», d'«absence de transparence» et de «manque de respect envers les citoyens». Montréal et d'autres villes envisagent de se joindre à la contestation judiciaire lancée par le Syndicat des travailleurs et travailleuses des Postes. À notre avis, cette guerre politico-légale est futile et néfaste.

La chute du courrier papier est rapide et inexorable. Postes Canada a su prendre sa place dans la livraison de colis et les transactions par internet, mais la croissance des revenus dans ces secteurs ne compense pas les pertes dans le «courrier transactionnel». Au cours des 9 premiers mois de 2014, le nombre de lettres distribuées par Postes Canada a diminué de 5,1% par rapport à la même période l'année précédente. Si la société enregistrera un profit en 2014, après deux années déficitaires, c'est grâce à une augmentation substantielle des tarifs.

Si Postes Canada ne s'adapte pas aux nouvelles réalités, elle affichera déficit après déficit. Qui paiera? La Ville de Montréal?

Selon la commission du conseil municipal qui a étudié la question, l'implantation des boîtes postales communautaires aura des effets catastrophiques: accès difficile pour les personnes à mobilité réduite, déneigement rendu plus compliqué, augmentation des gaz à effet de serre (!), hausse de la criminalité (!!), fragilisation du statut de Montréal comme «ville de design» (!!!), etc.

Montréal et d'autres municipalités se plaignent de ne pas avoir été consultées. Or, il n'appartient pas aux élus municipaux de gérer le service postal au Canada. Alors que plusieurs d'entre elles réduisent leurs services pour des raisons budgétaires, elles sont mal placées pour sermonner la Société canadienne des postes au sujet de ses propres défis financiers.

Les villes feraient oeuvre plus utile en collaborant avec Postes Canada afin de minimiser les inconvénients de son nouveau modèle d'affaires pour leurs citoyens. Les municipalités qui ont choisi cette approche - par exemple Pointe-Claire et Kirkland - ont trouvé une société d'État ouverte aux suggestions.

Dans les municipalités de l'agglomération dont l'aménagement a tout de celui des banlieues, les boîtes communautaires s'intégreront facilement au décor, pour peu que les emplacements soient bien choisis.

La situation est plus problématique dans les quartiers centraux de Montréal. Postes Canada en est d'ailleurs consciente, puisqu'elle se donne jusqu'à trois ans pour y installer des boîtes communautaires. Au lieu de la sommer de «s'enlever le doigt de dedans le nez», le maire Coderre et son administration devraient employer ce délai pour imaginer, de concert avec la Société canadienne des postes, des solutions avantageuses pour les Montréalais. Si Montréal est vraiment une «ville de design», pourquoi ne pas concevoir des boîtes aux lettres adaptées à l'aménagement et à l'architecture qui la caractérisent?