Après 30 heures supplémentaires de négociations, la conférence de Lima sur les changements climatiques a abouti à un accord censé déblayer le terrain en vue d'une entente finale à Paris, dans un an. Toutefois, le texte adopté par les 195 pays participants camoufle mal l'immense fossé entre d'une part les discours émus sur le sort de la planète et, d'autre part, les efforts concrets que les gouvernements sont disposés à faire.

Stimulés par l'entente annoncée le mois dernier par les États-Unis et la Chine, les délégués étaient arrivés dans la capitale du Pérou débordants d'optimisme. Ils ont vite réalisé que si tous, en principe, s'entendent sur l'objectif, chacun reste surtout déterminé à défendre ses intérêts.

On espérait que les diplomates puissent élaguer la première ébauche du texte préparée en vue de la rencontre de Paris. Finalement, cette ébauche est restée presque intacte, c'est-à-dire qu'aucun progrès n'a été fait sur une foule de questions délicates. Difficile de ne pas donner raison au porte-parole de Greenpeace: «Les gouvernements ont tout simplement reporté à plus tard toutes les décisions difficiles.»

Les discussions ont porté sur le court terme, c'est-à-dire sur ce que devront faire les pays au cours des prochains mois. Les écologistes auraient voulu que les gouvernements soient tenus d'annoncer dès le premier trimestre de l'an prochain les cibles de réduction d'émissions de gaz à effet de serre qu'ils comptent atteindre à partir de 2020. Chaque plan national aurait ensuite été évalué par des experts internationaux. L'«Appel à l'action climatique de Lima» est beaucoup moins contraignant. Seuls les pays «qui sont prêts à le faire» publieront leurs objectifs d'ici la fin du mois de mars. C'est seulement le 1er novembre 2015, à peine un mois avant l'ouverture de la conférence de Paris, que l'ONU rendra public «un rapport synthèse sur l'effet global» des plans annoncés.

Les diplomates ont aussi beaucoup parlé d'argent. Les pays en voie de développement voulaient que les pays riches s'engagent clairement, dès aujourd'hui, à les aider financièrement à réduire leurs émissions, à réparer les dégâts causés par les changements climatiques et à s'adapter au nouveau climat. Les contributions annoncées jusqu'à maintenant au Fonds vert pour le climat totalisent 10,2 milliards. Ce n'est pas rien, mais on n'est très loin des 100 milliards par an que les pays développés ont promis de mobiliser à compter de 2020.

La conférence de Lima n'a certes pas échoué comme celle de Copenhague il y a cinq ans. Cependant, les progrès accomplis sont si minces qu'on se demande comment les États parviendront à conclure en 12 mois l'entente ambitieuse que dicte la gravité de la menace climatique. «Le fantôme de Copenhague s'éloigne, l'espoir d'un succès à Paris se rapproche», a lancé le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius. Souhaitons qu'au cours de la prochaine année, les gouvernants de la planète lui donnent raison d'être aussi optimiste.