Le ministre fédéral Maxime Bernier a commis plus que sa part de gaffes, de sorte que bien des gens ne le prennent plus au sérieux. Il reste que, peut-être parce qu'il n'a rien à perdre, M. Bernier ose dire tout haut ce que d'autres élus préfèrent garder pour eux. Ainsi en est-il de l'allocution qu'il a prononcée hier à Montréal, au sujet de l'avenir politique du Québec.

À la suite de l'élection d'un gouvernement fédéraliste à Québec, les médias de la province ont consacré beaucoup de temps et d'espace à s'interroger sur l'avenir du Parti québécois et de l'option indépendantiste, constate Maxime Bernier. Or, soutient-il à raison, les Québécois devraient se préoccuper d'une question plus pressante: comment vont-ils reprendre leur place au sein de la fédération canadienne?

Car si les Québécois ont pris leurs distances du projet souverainiste, en ce qui a trait aux relations avec les instances fédérales et avec les autres régions du pays, ils restent sur la touche. La seule politique du gouvernement du Québec à l'égard d'Ottawa, c'est de réclamer toujours plus d'argent et plus de pouvoirs.

S'ils veulent participer à la gestion de leur pays, les Québécois doivent réinvestir les instances nationales et les partis fédéraux. Surtout, ils doivent cesser de voir la fédération en termes bêtement financiers. «C'est toujours la même politique de quémandage, déplore le ministre d'État à la Petite entreprise. Même si les montants en provenance d'Ottawa augmentent, ce n'est jamais assez. On en veut toujours plus, sinon c'est la preuve que le fédéralisme n'est pas rentable.»

On le voit dans le dossier du pont Champlain, où tous les élus de la région de Montréal exigent que le fédéral paie la totalité de la facture, plus le coût d'un système léger sur rail. Six milliards? Sept milliards? Peu importe, qu'Ottawa paie!

Les propos de M. Bernier ont évidemment été condamnés à l'Assemblée nationale. On ne s'étonne pas que les péquistes y voient «un discours de colonisé». Il est toutefois dommage que le nouveau ministre des Finances, Carlos Leitao, endosse le discours de mendiant de ses prédécesseurs.

Maxime Bernier invite le Québec à se joindre aux autres provinces pour exiger «un fédéralisme le plus décentralisé possible». Là, M. Bernier succombe au travers qu'il dénonce. Le gouvernement du Québec en a déjà plein les bras avec les responsabilités qui sont les siennes; obtenir plus de pouvoirs devrait être la dernière de ses préoccupations.

Entre faire du reste du Canada le bouc émissaire de tous les malheurs du Québec et être «à genoux» devant Ottawa, il existe une politique raisonnable et responsable, fièrement québécoise et résolument fédéraliste. Souhaitons que, pour le bien du Québec et du Canada, le gouvernement Couillard aura le courage de suivre cette voie.