Sous l'aspect des relations publiques, le président du conseil de Montreal, Maine&Atlantic, Ed Burkhardt, a fait tout le contraire de ce que conseillent les experts dans le domaine. De là à conclure que c'est sa négligence et sa cupidité qui sont à l'origine de la tragédie de Lac-Mégantic, ou encore qu'il est un «assassin» et un «rat», il y a une distance que seuls les résultats des enquêtes en cours permettront de franchir (ou pas).

Les résidants de Lac-Mégantic sont accablés et furieux; par son absence lors des premiers jours, par ses déclarations malhabiles, par sa personnalité même, M. Burkhardt s'est offert comme cible parfaite à leur légitime colère. 

L'hostilité des médias à son endroit est plus difficile à comprendre, car ce qu'on reproche à l'homme d'affaires, c'est de ne pas avoir employé les trucs des firmes de relations publiques, trucs que dénoncent régulièrement les journalistes. D'ailleurs, le cas Burkhardt deviendra sans doute un des meilleurs arguments de vente des firmes en question.

On l'a beaucoup dit, Ed Burkhardt aurait dû arriver rapidement sur les lieux, exprimer sa compassion pour la population locale et offrir toute l'aide que pouvait donner sa compagnie. Il a choisi de gérer la crise de ses bureaux à Chicago, à une époque où l'image, donc la présence physique, est d'une importance primordiale.

Le patron de la MMA a aussi commis l'erreur... de répondre aux questions des journalistes. Une des règles des communications en temps de crise est de ne rien dire dont on n'est pas absolument certain. Dans le cas présent, les informations parvenaient à M. Burkhardt (comme aux autres intervenants) par bribes, et c'est sur cette base fragile qu'il exprimait quotidiennement son avis sur les événements. 

D'où plusieurs contradictions. Aux questions sur les causes de la tragédie, il lui aurait fallu répondre qu'on devait attendre les résultats des enquêtes. Cela lui aurait évidemment valu des reproches, mais de deux maux il faut choisir le moindre.

Une fois sa compassion exprimée dès les premières heures, M. Burkhardt aurait dû céder sa place à un autre porte-parole. Certaines personnes ne sont tout simplement pas douées pour la communication; c'est le cas de cet homme de train. Même lorsqu'il s'excuse pour ce qui est arrivé, ça ne passe pas. Peut-être parce qu'il s'en fiche. Ou peut-être parce que, comme bien des gens, il est incapable d'exprimer ses émotions.

Cela dit, il faut faire la distinction entre la personnalité désagréable du patron de MMA et l'ampleur de sa responsabilité dans ce qui s'est produit. Comme dirigeant de l'entreprise, il doit certes assumer une part importante de cette responsabilité. Cependant, a-t-il violé des lois ou des règles? Est-il coupable de négligence criminelle? A-t-il réduit les mesures de sécurité, sachant les risques, pour augmenter les profits? Pour l'instant, personne n'est en mesure de répondre à ces questions.