Depuis de nombreuses années, le gouvernement du Québec, quel que soit le parti au pouvoir, profite de la présentation du budget pour dénoncer la prétendue pingrerie d'Ottawa dans ses relations avec les provinces. À cet égard, le ministre des Finances, Nicolas Marceau, suit donc les traces de tous ses prédécesseurs depuis Onésime Gagnon, sous Duplessis.

C'est devenu pratique courante: le budget Marceau comporte un chapitre entier décrivant tout ce qui ne va pas dans le régime de transferts fédéraux. Le ministre nous annonce même «le retour du déséquilibre fiscal». On se souvient de cette bibitte-là: Ottawa ayant sabré dans ses transferts aux provinces, celles-ci avaient dû comprimer leurs dépenses alors même que le fédéral nageait dans les surplus.

Le thème ayant été fiscalement et politiquement rentable pour le gouvernement péquiste de l'époque, le gouvernement Marois souhaite apparemment remonter sur ce cheval. Sauf qu'il n'y a aucune comparaison possible entre la situation actuelle et celle qui prévalait il y a dix ans. En effet, de 2002-2003 à 2011-2012, les transferts fédéraux aux provinces ont considérablement augmenté. Dans le cas du Québec, ils sont passés de 9,5 milliards à 16,9 milliards.

Le gouvernement du PQ, comme son prédécesseur libéral, déplore des changements apportés par le fédéral aux méthodes de calcul des différents transferts. Certaines de ces critiques sont valables. D'autres reviennent à déplorer qu'Ottawa cherche à contrôler la croissance de ses dépenses, un curieux reproche.

Par exemple, Québec dénonce la décision du gouvernement Harper de limiter l'augmentation du transfert destiné aux soins de santé à la croissance du PIB au lieu du taux annuel de 6% qui prévaut depuis une décennie. Ce choix est pourtant d'une sagesse incontestable.

La thèse sous-tendant l'obsession de Québec pour les supposées lacunes des transferts fédéraux, c'est que celles-ci sont à l'origine de l'impasse des finances publiques de la province. Or, il n'en est rien. Si le gouvernement ne parvient pas à payer tous les services qu'il a promis aux Québécois, c'est tout simplement qu'il a embrassé trop large. Quand une société n'est pas assez riche pour héberger et soigner correctement ses personnes âgées, elle ne se paie pas des luxes comme le gel du tarif des garderies et des droits de scolarité universitaires.

Ces «choix de société», s'ajoutant au fait que la complainte contre les transferts fédéraux est répétée année après année peu importe les circonstances, minent la crédibilité des critiques du Québec. Celles de M. Marceau ont d'autant moins de chances d'être entendues que le ministre a terminé son discours de mardi en affirmant que «nous pourrons aller beaucoup plus loin en disposant de tous les moyens d'un pays souverain». Ah oui? Alors, pourquoi tant se préoccuper des transferts fédéraux?