Une commission de l'Assemblée nationale entreprend aujourd'hui l'étude du projet de loi 1 sur l'intégrité en matière de contrats publics. Le gouvernement Marois veut faire adopter la loi rapidement et le contexte actuel lui assure l'appui de la population à cet égard. Il ne faut pas bâcler le travail pour autant.

Le nouveau gouvernement a adopté une approche beaucoup plus lourde que celle qu'avaient choisie les libéraux.

Au lieu de dresser une liste noire des entreprises qui, en raison de leur comportement passé, ne peuvent pas avoir accès aux contrats publics, Québec mettra en place un registre des entreprises autorisées.

Toute compagnie souhaitant faire affaire avec le gouvernement, les réseaux de la santé et de l'éducation, les sociétés d'État et les municipalités devra faire une demande d'autorisation et montrer patte blanche.

Par conséquent, des milliers d'entreprises devront remplir de la paperasse additionnelle. Désagréable, mais c'est le prix à payer pour les nombreux abus commis dans le passé.

L'Autorité des marchés financiers, avec l'aide de l'Unité permanente anticorruption, gérera le registre des entreprises autorisées.

Le gouvernement a étudié plusieurs possibilités avant d'en venir à la conclusion que l'AMF était la mieux placée pour s'acquitter de cette tâche.

Les députés devront toutefois s'assurer que cette nouvelle responsabilité ne distraira pas l'Autorité du coeur de sa mission, la protection des épargnants et des investisseurs.

Le projet de loi prévoit que toute entreprise déclarée coupable d'une ou l'autre d'une longue série d'infractions énumérées, ou dont un des dirigeants l'a été, se verra refuser l'autorisation permettant d'avoir accès aux contrats publics.

Le gouvernement a voulu aussi accorder à l'AMF une certaine discrétion afin d'éviter qu'une compagnie ne parvienne à contourner les exigences de la loi.

Ainsi, en vertu de l'article 21.25, l'Autorité pourra refuser d'octroyer une autorisation «si elle considère que la confiance du public est affectée en raison du manque d'intégrité de l'entreprise (...)».

Ce texte a fait sursauter plusieurs juristes en raison de son imprécision. Qu'est-ce que «la confiance du public» ? Qu'est-ce que le «manque d'intégrité» ?

Le projet de loi fournit à l'AMF quelques lignes directrices pour l'application de l'article en question mais celles-ci sont également fort vagues.

Les députés devraient resserrer le libellé de l'article 21.25 pour éviter les décisions arbitraires et les contestations judiciaires.

Le régime proposé par le projet de loi 1 sera exigeant et coûteux pour les entreprises. Cependant, le gouvernement a raison d'emprunter cette voie : seul un régime aussi rigoureux pourra restaurer la confiance de la population dans l'attribution des contrats publics.