Le gouvernement Marois a déposé hier son projet de loi 1 sur les exigences éthiques imposées aux entreprises souhaitant avoir accès aux contrats publics. D'autres mesures suivront, a annoncé la première ministre dans son discours inaugural mercredi, dans le but de «briser la corruption».

Le PQ s'attaque à ce grave problème avec la détermination propre à un nouveau gouvernement. Bravo! Cependant, n'oublions pas que les lois les plus sévères n'enrayeront le mal que pour un temps. Les corrupteurs imagineront des moyens de les contourner. Et ils trouveront des élus et des fonctionnaires à l'éthique élastique prêts à les aider.

«Devant la corruption, à partir de maintenant, ce sera tolérance zéro!» a déclaré Mme Marois. Le plus difficile sera de faire en sorte que cette attitude se répande et se maintienne partout dans le secteur public. Ce qu'ont décrit jusqu'ici les témoins devant la commission Charbonneau, c'est une culture de corruption qui s'est installée au fil de nombreuses années. Les cadeaux aux fonctionnaires, des parties de golf aux bouteilles de vin, faisaient partie de la «culture d'entreprise» à la Ville de Montréal, selon l'ingénieur à la retraite Luc Leclerc. Il était facile ensuite de passer des bouteilles de vin aux enveloppes, des parties de golf aux voyages. «Tout le monde le savait», a expliqué M. Leclerc. Tout le monde se taisait. Plusieurs en profitaient.

Briser la culture de la corruption nécessite une affirmation forte et constante des exigences de l'éthique, des mesures facilitant la dénonciation et une vigilance de tous les instants. Il en est des corrupteurs comme des automobilistes adeptes de vitesse: ce n'est pas tant la sévérité des peines qui les dissuade que la probabilité de se faire prendre. Selon M. Leclerc, l'absence de normes claires et de vérification efficace a permis à la corruption de prendre de l'ampleur: «On se sent plus à l'aise quand on pense qu'il n'y a personne qui va passer en arrière.» Lorsque, en 2009, la Ville a publié un «guide de conduite» interdisant formellement à ses employés d'accepter des avantages, «ça a sonné la fin de la récréation.»

Il importe donc de mettre en place un système rigoureux et permanent de lutte à la corruption. Sous réserve d'un examen plus approfondi, le «registre des entreprises autorisées à contracter avec l'État», prévu par le projet de loi 1, est un outil très prometteur. Néanmoins, l'histoire enseigne qu'il faudra éviter de nous asseoir sur nos lauriers éthiques.