Pendant la campagne électorale du printemps dernier, le candidat socialiste, François Hollande, a pourfendu l'obsession pour l'austérité du président sortant, Nicolas Sarkozy, et de son alliée allemande, Angela Merkel. Quatre mois plus tard, il vient de présenter aux Français un «agenda de redressement» fondé, pour l'essentiel, sur le rétablissement de l'équilibre des finances publiques. Autrement dit, l'austérité.

Selon la Cour des comptes, sorte de vérificateur général français, Paris doit trouver 30 milliards d'euros pour ramener son déficit à 3% du PIB l'an prochain, comme il s'est engagé à le faire. Pour la Cour, «le respect de cette trajectoire constitue un impératif de crédibilité vis-à-vis de nos partenaires européens comme de nos créanciers.» M. Hollande renchérit: «Il s'agit de notre souveraineté par rapport aux marchés».

Si rien n'est fait, la dette publique française, parmi les plus élevées d'Europe, continuera à croître. Aussi, à peu près tout le monde s'entend sur la nécessité d'agir. Mais il y a l'échéancier. Et il y a la manière. Au sujet de l'échéancier, des économistes proches de la gauche déplorent que le président Hollande maintienne la cible de 3% du PIB pour 2013. À leurs yeux, cette stratégie risque d'aggraver la stagnation économique que subit la France depuis plus d'un an.

Quant à la manière, M. Hollande a choisi de n'écouter ni l'OCDE ni la Cour des comptes, selon lesquelles le gros de l'effort budgétaire devrait se faire du côté des dépenses gouvernementales. Le président a plutôt annoncé que les deux tiers des 30 milliards requis viendront d'augmentations des impôts des particuliers et des entreprises. Les mesures qui attirent le plus l'attention concernent les contribuables riches, mais il reste que 40% des Français verseront plus d'argent à l'État.

Le jeu est risqué. La France prélève déjà davantage d'impôts que la plupart de ses compétiteurs (43% du PIB contre 36% en Allemagne et 35% au Royaume-Uni). Quoi qu'en pense le président, il y a des limites au «patriotisme» des contribuables, en France comme ailleurs. De plus, l'impôt spécial de 75% sur les revenus dépassant un million d'euros a créé un climat pervers de chasse aux riches. Le quotidien Libération est allé jusqu'à titrer hier «Casse-toi, riche con!», s'adressant à l'homme le plus riche de France, Bernard Arnault. Celui-ci a récemment demandé la nationalité belge, tout en assurant qu'il continuera de payer ses impôts en France.

Quoi qu'on pense des mesures annoncées par François Hollande, on doit tirer un enseignement de son virage vers l'austérité: dans le monde économique et financier d'aujourd'hui, les États lourdement endettés n'ont pas le choix. Ou bien ils prennent eux-mêmes les mesures nécessaires à la réduction de leur dette, ou bien leurs créanciers, un jour ou l'autre, les forceront à agir. Cette leçon vaut pour le Québec comme pour les autres.