Une importante firme américaine de gestion de fonds, PIMCO, a publié la semaine dernière une note soulevant des inquiétudes sur l'impact possible de la campagne électorale, en particulier du débat sur la souveraineté, sur les coûts d'emprunt du gouvernement du Québec. Les leaders indépendantistes se sont empressés de rejeter ces inquiétudes du revers de la main, le député péquiste Nicolas Marceau dénonçant ce nouveau «coup de la Brink's».

La réaction est typique: à toute mention des risques économiques potentiels de l'indépendance, les souverainistes réagissent en accusant l'auteur de mener une «campagne de peur». À leurs yeux, la séparation du Québec ne créera pas le moindre impact néfaste. Point. Nul doute n'est permis.

Dans sa note, le patron de PIMCO au Canada, Ed Devlin, souligne que depuis la crise de 2008-2009, les investisseurs sont extrêmement nerveux. On le voit quotidiennement en Europe. Dans ce contexte, écrit-il, «toute politique ou toute rhétorique susceptible de miner la confiance des investisseurs peut faire grimper rapidement les taux des obligations, lançant un cycle vicieux d'austérité et de croissance faible. La solvabilité (du gouvernement) pourrait être remise en question.»

M. Devlin souligne que, même si l'endettement du Québec (combiné avec sa part de la dette fédérale) n'est pas aussi élevé que celui de l'Italie, il existe des «similitudes frappantes» entre la situation financière des deux États. Si le Québec n'a pas à subir les taux d'emprunt imposés à Rome, «c'est parce qu'il fait partie d'une union monétaire et fiscale au sein du Canada tandis que l'Italie se trouve dans une union monétaire ne comportant pas d'union fiscale».

On peut trouver la comparaison avec l'Italie exagérée. Cependant, il est indéniable que le gouvernement du Québec est lourdement endetté et que cela pourrait poser problème dans l'éventualité d'une séparation. La crise de l'euro confirme qu'une union monétaire est difficilement viable sans une union fiscale, union fiscale qui limite nécessairement la marge de manoeuvre (la souveraineté) des États constituants.

Cette évolution soulève de graves questions sur la forme que prendrait une éventuelle association entre un Québec indépendant et le reste du Canada. Or, depuis quelques années, les indépendantistes se taisent à ce sujet. Par conséquent, on ne sait rien de ce qu'ils envisagent pour le lendemain d'un OUI. Souhaitent-ils négocier une union monétaire avec le Canada? Une union fiscale, ce qui suppose des institutions communes fortes (une fédération...)? Mystère.

À cette obscurité sur le long terme s'ajoute l'incertitude quant à la tenue d'un référendum au cours d'un premier mandat d'un gouvernement du PQ. Le candidat-vedette Jean-François Lisée avoue candidement que s'ils étaient clairs sur leurs intentions, les péquistes ne seraient pas élus!

Jamais le Parti québécois n'a été aussi vague au sujet de sa stratégie et de son projet. À quelques semaines d'élections qui pourraient confier à ce parti la gouverne du Québec, cette tactique de dissimulation est aussi déplorable qu'inquiétante.