Notre collègue Vincent Marissal rappelait hier avec raison qu'il faut toujours interpréter avec précaution les résultats des élections complémentaires. Cela vaut, bien sûr, pour la victoire du candidat du Parti québécois dans Argenteuil, circonscription détenue depuis 46 ans par le Parti libéral.

N'empêche, comme l'a admis le ministre des Finances, Raymond Bachand, les électeurs de la circonscription ont envoyé «un message au gouvernement». Clairement, comme la grande majorité des Québécois, les gens d'Argenteuil sont insatisfaits du gouvernement Charest. La part du vote obtenue par les libéraux a chuté de 16 points (49% à 33%); quelques milliers de sympathisants libéraux sont tout simplement restés à la maison.

Dans cette circonscription des Laurentides, la crise étudiante n'a pas aidé le parti de Jean Charest. Elle n'a pas non plus desservi la chef de l'opposition officielle, malgré les attaques répétées que lui a values son appui inconditionnel aux étudiants. Voilà qui est inquiétant pour les stratèges du PLQ dont l'«obsession du carré rouge» (dixit Mme Marois) semblait être l'ultime recours.

La part du vote du PQ a légèrement augmenté (2,5 points à 36,2%). Ce n'est donc pas parce qu'il a attiré davantage de votes que le parti souverainiste l'a emporté, mais parce que le vote libéral s'est effondré. Néanmoins, les péquistes ont toutes les raisons de se réjouir. Si, lors du prochain scrutin général, les Québécois décident de changer de gouvernement, leur réflexion se portera sur les partis susceptibles de prendre la place; le PQ a confirmé lundi son statut de principale solution de rechange au gouvernement Charest.

De son côté, la Coalition Avenir Québec a échoué son premier test électoral. Dans Argenteuil, la formation dirigée par François Legault avait une occasion en or de s'établir comme option crédible, ayant pu dénicher un candidat connu dans la région. Or, si la CAQ a fait deux fois mieux que l'ADQ en 2008, elle a quand même fini troisième, loin derrière le PQ et le PLQ.

Le premier ministre aura des décisions difficiles à prendre au cours de l'été. Par-dessus tout, M. Charest devra se demander ce que commandent les intérêts supérieurs du Québec.

Nous avons déjà écrit ici que seule la tenue d'élections au début de l'automne permettra de sortir de la crise étudiante. Dans le climat malsain qui prévaut, M. Charest ne pourrait prendre pire décision que de repousser l'échéance électorale au printemps 2013 en raison de sondages défavorables. La situation pourrirait davantage sans que les chances de réélection des libéraux n'augmentent.

Ce gouvernement est au pouvoir depuis neuf ans, dont presque quatre dans ce troisième mandat. Son bilan et ses politiques sont connus, les propositions des autres partis aussi, notamment au sujet des droits de scolarité. Laissons les Québécois trancher.