Le ministre des Finances, Jim Flaherty, a présenté hier la mise à jour automnale des projections économiques et financières du gouvernement canadien. Celle-ci tient compte des développements des derniers mois - crise des dettes souveraines en Europe, reprise anémique aux États-Unis - qui ont commencé à plomber la croissance chez nous. Cette évolution de la conjoncture a comme principal effet de forcer Ottawa à repousser d'un an l'atteinte de l'équilibre budgétaire, désormais prévu pour 2015-2016.

Néanmoins, sur le plan budgétaire comme économique, le Canada reste dans une situation enviable. Le niveau d'endettement du fédéral est relativement faible. Et malgré les 54 000 emplois perdus en octobre, le taux de chômage reste bien en deçà des niveaux atteints au cours de la récession.

Cela dit, le pays reste évidemment exposé à ce qui se passe à l'étranger, en particulier la tempête européenne. Or, le moins que l'on puisse dire, c'est que celle-ci ne se calme pas. Après avoir eu raison du premier ministre grec, elle vient d'avoir la tête de son homologue italien. L'annonce de la démission prochaine de Silvio Berlusconi rassurera-t-elle enfin les investisseurs? Ce n'est pas sûr.

Hier, on apprenait que des grandes banques européennes ont vendu à perte une partie substantielle de leurs avoirs en obligations des pays d'Europe du Sud, ce qui risque d'accentuer la pression à la hausse sur les coûts d'emprunt de ces États et donc, d'aggraver la crise.

Par ailleurs, dans son premier discours depuis sa nomination à la président du Conseil de stabilité financière, le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, n'a pas caché sa crainte de voir la crise de la zone euro «déclencher de vives fluctuations de la liquidité mondiale dont les conséquences se feraient sentir au sein de tous les systèmes financiers et de toutes les économies.»

Dans ce contexte, la mise à jour présentée par M. Flaherty fait preuve d'une prudence bien avisée. Parce que rien n'indique pour l'instant que l'économie se dirige vers une nouvelle récession, le ministre n'annonce pas d'importantes mesures de relance et garde le cap sur les compressions des dépenses. Toutefois, il diminue de moitié la hausse prévue en 2012 des taux de cotisation d'assurance-emploi de façon à limiter l'effet de freinage d'une trop forte augmentation.

Saine prudence aussi du côté des prévisions budgétaires: le gouvernement a intégré à ces prévisions la possibilité que ses revenus soient plus bas qu'attendu (de 3 à 4,5 milliards selon les années).

Et si, justement, la situation économique se détériore? «Nous ne nous enfermerons pas dans un carcan idéologique lorsqu'il faudra prendre des décisions pour conserver la vigueur de notre économie et protéger les Canadiens, leur sécurité financière et leurs emplois», a assuré le ministre des Finances. Une déclaration à la fois sage et rassurante.