Les médias en parlent très peu. C'est cependant une grande source d'inquiétude pour beaucoup d'entreprises canadiennes. Chaque année, plusieurs d'entre elles doivent consacrer des millions pour combler un déficit théorique du régime de retraite de leurs employés (on parle ici des régimes à prestations déterminées ou RRPD). Autant d'argent qui ne peut être consacré à la modernisation de leurs équipements, à la recherche sur de nouveaux produits ou à la création d'emplois.

Pourquoi en parle-t-on si peu? Parce que l'affaire est excessivement complexe. Outre les actuaires et les comptables, à peu près personne ne s'y retrouve. Et pourtant, l'avenir de plusieurs compagnies et les revenus de retraite de millions de Canadiens sont en cause.

C'est la crise économique de 2008-2009 et la baisse des taux d'intérêt subséquente qui sont à l'origine de la crise. À intervalles réguliers, les administrateurs des régimes de retraite doivent calculer la solvabilité de leur régime. Il s'agit de déterminer la capacité de celui-ci à remplir ses obligations envers les retraités actuels et futurs si l'entreprise faisait faillite à cette date. Si ce calcul indique que, dans ce scénario extrême, le régime ne serait pas en mesure de satisfaire ses engagements, l'entreprise doit combler le déficit. Plus les taux d'intérêt à long terme sont bas, plus le déficit à combler est important. D'où la crise actuelle.

En 2009, le gouvernement du Québec a mis en place des mesures temporaires pour permettre aux entreprises touchées de traverser ce qui, croyait-on, ne serait qu'un mauvais moment à passer. Or, deux ans plus tard, les taux d'intérêt sont toujours au plancher. Conséquence, au Canada, 90 % des régimes à prestations déterminées se trouvent en déficit de solvabilité.

Par ailleurs, les tendances démographiques à long terme pèseront de plus en plus lourd sur ces régimes. Au Québec comme ailleurs au pays, le gouvernement ne peut donc plus se contenter de mesures temporaires; il faut trouver des solutions à long terme.

Le président de la Régie des rentes, Denys Jean, s'est engagé à présenter au gouvernement provincial des pistes de solution d'ici la fin de l'année prochaine. Quelles que soient celles qu'on retiendra, il y aura transfert d'une petite partie du risque du régime sur les épaules des participants. Ceux-ci auront le réflexe compréhensible de se rebiffer. Toutefois, cette réaction passée, ils devront intégrer à leur réflexion un aspect central du problème: si les entreprises ne voient pas diminuer le coût des régimes à prestations déterminées, elles laisseront ceux-ci tomber pour passer à des régimes à cotisations déterminées, beaucoup moins avantageux pour leurs employés. En somme, le gouvernement, les entreprises et les participants ont tous intérêt à mettre au point de nouvelles règles qui adapteront les RRPD au contexte économique et démographique du XXIe siècle.