On sait maintenant ce que la Coalition pour l'avenir du Québec propose aux Québécois. Certains diront que les propositions de François Legault et de ses acolytes n'ont rien de révolutionnaires. Sans doute, mais c'est chez nous la condition de la survie politique. Les électeurs ne sont pas prêts à la révolution culturelle qui permettrait au Québec de vraiment prendre son élan.

Premier constat: la CAQ est résolument nationaliste. Cela se voit dans les documents portant sur la culture et sur l'économie. En ce qui a trait à la défense du français, par exemple, le groupe propose de redoubler d'ardeur dans l'application de la loi 101. Il souhaite aussi le recours à la disposition dérogatoire de la Constitution canadienne lorsque la protection de la langue officielle du Québec l'exige.

Dans le domaine économique, le Coalition veut «passer d'une économie de succursales à une véritable économie de propriétaires», notamment en exigeant de la Caisse de dépôt et placement qu'elle investisse davantage ici et empêche le départ vers d'autres cieux des sièges sociaux de grandes entreprises.

Le nationalisme du groupe Legault s'exprime donc par un rôle accru de l'État québécois. C'est sans doute pour cette raison que, selon ce qu'a appris notre collègue Paul Journet, M. Legault trouve le chef de l'ADQ, Gérard Deltell, «trop fédéraliste» à son goût. Le nationalisme de M. Deltell passe non pas par le bras de l'État, mais par la responsabilisation individuelle et collective. En matière linguistique, le chef adéquiste prône un meilleur enseignement de l'anglais et s'oppose au recours à la disposition dérogatoire. Ces positions le rendent-elles moins nationaliste? Suivant quels critères les dirigeants de la CAQ jaugeront-ils l'amour du Québec des personnes intéressées à les rejoindre? Un doute surgit tout à coup sur la volonté «rassembleuse» de la Coalition.

Deuxième constat: la coalition Legault n'est pas de droite, ni même de centre droite. Dans la mesure où ces étiquettes sont pertinentes, les politiques proposées sont plutôt caractéristiques du centre gauche. Ainsi, pour régler les problèmes qui minent le système de santé, la CAQ ne prévoit pas ouvrir la porte à une concurrence du secteur privé, mais envisage plutôt une réorganisation du réseau en vue de le rendre plus efficace (déjà entendu quelque part...). En ce qui a trait à l'éducation, si la Coalition propose un amincissement des structures et des droits de scolarité modulés, elle compte financer une partie de son programme par le gel des subventions «exceptionnellement élevées» aux écoles privées.

On le voit, la CAQ semble davantage susceptible d'attirer des péquistes déçus (tel M. Legault lui-même) que des libéraux. Quant aux adéquistes, ceux qui souhaitent adhérer au nouveau parti devront se livrer à de douloureuses contorsions idéologiques.

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