Jean Charest et Pauline Marois ont continué hier de se chicaner sur la valeur des permis d'exploration du gaz de schiste. Selon le chef de l'opposition, «le Québec s'est privé de revenus importants en donnant littéralement ces permis». Le premier ministre a répliqué en accusant son adversaire d'avoir «payé les entreprises gazières pour procéder à des forages» à l'époque où elle était ministre des Finances.

Jean Charest et Pauline Marois ont continué hier de se chicaner sur la valeur des permis d'exploration du gaz de schiste. Selon le chef de l'opposition, «le Québec s'est privé de revenus importants en donnant littéralement ces permis». Le premier ministre a répliqué en accusant son adversaire d'avoir «payé les entreprises gazières pour procéder à des forages» à l'époque où elle était ministre des Finances.

Le PQ marque sans doute des points en soutenant que le gouvernement a «bradé» les ressources gazières du Québec. La réalité, cependant, c'est que la politique du Québec en cette matière est la même depuis de nombreuses années, que les libéraux ou les péquistes soient au pouvoir.

Le prix des permis d'exploration - 10 cents par année par hectare - a été établi par règlement en 1988 et n'a pas été modifié depuis. Si ce prix est très bas en comparaison à ce qu'on observe en Alberta et en Colombie-Britannique, c'est tout simplement que jusqu'à présent, à peu près personne ne pensait qu'on trouverait du gaz ou de pétrole dans le sous-sol québécois. Rêvant néanmoins que la province se transforme un jour en Arabie du Nord, les gouvernements qui se sont succédés à Québec ont multiplié les mesures fiscales visant à encourager l'exploration.

Le gouvernement Charest aurait-il dû hausser le prix des permis après la découverte encourageante dans le shale de l'Utica, en 2008? Peut-être. Mais l'histoire mettait en garde contre tout excès d'optimisme. Nombre de fois au cours des 40 dernières années, des entreprises et des géologues ont prétendu que le Québec était «assis sur des milliers de mètres cubes de gaz» (citation de 1991). Chaque fois, il s'est agi d'un mirage. C'est pourquoi, lors d'une précédente vague d'optimisme (1996 à 1999), le gouvernement péquiste a vendu des permis d'exploration pour des centaines de milliers d'hectares sans augmenter le prix. Le PQ avait-il alors « bradé » nos ressources?

Le premier ministre pousse lui aussi le bouchon trop loin lorsqu'il accuse la chef du PQ d'avoir payé les gazières pour forer. Il est vrai que dans son budget de 2001-2002, Mme Marois a mis en place un crédit d'impôt remboursable afin d'«assurer un soutien efficace à l'exploration minière, pétrolière et gazière au Québec». Mais si les libéraux trouvaient cette mesure si mauvaise, pourquoi ne l'ont-ils pas abolie dès leur arrivée au pouvoir en 2003?

Au-delà des effets de toge politiciens, le débat sur les milliards qu'aurait perdus le Québec en «donnant» les permis d'exploration est totalement débranché de la réalité. Tant qu'on ne saura pas si oui ou non, il y a du gaz et/ou du pétrole dans le sous-sol québécois, ces permis ne valent probablement pas beaucoup plus que ce qui a été payé. Et l'annonce d'un moratoire de facto sur l'exploration, à la suite du rapport du BAPE, n'a certainement rien fait pour en augmenter la valeur.