Peu de gens sont conscients de l'immensité de l'Arctique canadien. Immensité géographique, bien sûr. Immense potentiel économique, aussi. Et immense fragilité écologique.

Peu de gens sont conscients de l'immensité de l'Arctique canadien. Immensité géographique, bien sûr. Immense potentiel économique, aussi. Et immense fragilité écologique.

Par conséquent, aux yeux de plusieurs, les démarches du gouvernement Harper pour affirmer notre souveraineté dans l'Arctique ne visent qu'à mousser le nationalisme canadien à des fins partisanes. Il y a de cela, c'est certain. Toutefois, au cours des prochaines années, quel que soit le parti au pouvoir à Ottawa, l'Arctique demeurera une priorité. L'Énoncé de politique étrangère pour l'Arctique publié hier par le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, demeurera longtemps pertinent. Personne n'en contestera le fondement: «L'importance géopolitique de la région et ses implications pour le Canada n'ont jamais été plus grandes.»

L'Arctique, c'est 40% du territoire du Canada. La base d'Alert, à l'extrémité nord de l'île d'Ellesmere, se trouve à 4000 kilomètres de Montréal, une distance supérieure de 400 kilomètres à celle qui sépare Montréal de Vancouver.

Cette vaste et sauvage région recèle un formidable potentiel minier. On pense notamment au pétrole, au gaz et au diamant. Ces ressources suscitent l'envie de nombreux pays et intérêts, d'où le bras de fer juridique, scientifique et militaire que se livrent le Canada, les États-Unis, la Russie et le Danemark pour déterminer à qui appartiennent les fonds marins au-delà de la zone économique de 200 miles de chacun.

L'Énoncé du ministre Cannon affirme l'intention du gouvernement canadien de défendre ses intérêts dans la région, notamment de faire reconnaître par la communauté internationale «toute l'étendue de notre plateau continental élargi». L'opération Nanook, que suit cette année notre collègue Hugo Fontaine (voir son reportage en p. A10 et A11), est l'une des nombreuses mesures mises en place pour montrer que le Canada peut et veut prendre toute sa place dans le Nord.

Peu importe l'étendue du territoire qui sera finalement consenti au Canada, l'exploitation des ressources naturelles de l'Arctique constituera un défi colossal. Il s'agira de s'assurer que ces ressources contribuent à la prospérité du pays tout en protégeant l'environnement unique de la région, le tout en authentique partenariat avec la population inuit. «À titre de superpuissance émergente en matière d'énergie propre, le Canada continuera de soutenir une exploitation gazière et pétrolière responsable et soutenue dans le Nord», soutient l'Énoncé. Pour l'instant, cette affirmation est risible. Quoi qu'en dise le gouvernement, le Canada n'est pas «une superpuissance émergente en matière d'énergie propre». Puisque nous sommes incapables d'exploiter de façon responsable le pétrole des sables bitumineux, pourquoi le monde devrait-il nous faire confiance pour agir plus intelligemment dans l'Arctique?