Élu de justesse hier, le nouveau chef de l'Action démocratique du Québec, Gilles Taillon, a devant lui une tâche colossale. Selon le dernier sondage Crop-La Presse, l'ADQ est au plus bas avec à peine 7% des intentions de vote. Le fait qu'à peine 3800 (30%) des membres du parti se soient donné la peine de voter est une autre indication du travail de reconstruction qui est à faire.

Comment M. Taillon pourra-t-il réussir là où Mario Dumont, un politicien particulièrement doué, a échoué?

Au cours de sa campagne à la direction, M. Taillon est resté fidèle aux idées défendues par son parti: réduire les dépenses de l'État, s'attaquer à la dette, aide de 100$ par semaine aux familles n'ayant pas recours aux garderies subventionnées, présence accrue du privé en santé, abolition des commissions scolaires.

Gilles Taillon a cherché à donner un contenu concret à l'approche autonomiste de l'ADQ. Il propose «un nouveau pacte pour le Québec», un beau titre qui cache une approche des plus traditionnelles: plus de pouvoirs pour le gouvernement du Québec, moins pour le gouvernement fédéral.

Au fil des ans, plusieurs de ces idées ont attiré l'attention des Québécois en raison de leur côté audacieux. Les adéquistes ont réussi à «brasser la cage», comme l'a dit pendant la campagne celui qui a fini deuxième hier, Éric Caire. Toutefois, ils n'ont pas su aller au-delà, démontrer qu'ils seraient en mesure de gouverner le Québec.

Aujourd'hui, l'ADQ souffre d'un grave déficit de crédibilité. M. Taillon l'admettait lui-même dans sa plateforme en soulignant que la formation devait viser «une prestation irréprochable sur le plan du contenu». Par son expérience, par ses connaissances en matière d'économie et de finances publiques, l'ancien président du Conseil du patronat du Québec a le bagage nécessaire pour travailler sur ce point faible.

À très court terme, le premier défi du nouveau chef sera d'unir son parti. M. Taillon aura l'occasion de montrer s'il sait être un joueur d'équipe.

Le leader adéquiste devra présenter à l'électorat une équipe de qualité, ce qui ne sera pas facile si le parti demeure aussi bas dans les sondages. Il lui faudra enfin convaincre les Québécois que le modèle issu de la Révolution tranquille doit être revu en profondeur. Jean Charest n'y est pas parvenu, Mario Dumont non plus. Si M. Taillon n'y arrive pas, ce sera sans doute la fin du parcours de l'Action démocratique du Québec.

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