Le conseil général du Parti libéral du Québec s'est tenu en fin de semaine sous le thème du développement énergétique du Québec. Le premier ministre Jean Charest y a présenté sa vision du Québec de l'avenir, un Québec qui serait «la première puissance mondiale d'énergies propres et renouvelables». C'est un projet mobilisateur que nous applaudissons. Il est déplorable que les libéraux aient choisi d'en faire une affaire partisane.

Une vidéo présentée aux militants dimanche retraçait l'histoire de l'hydroélectricité au Québec. Le PLQ a réussi le tour de force d'y raconter la nationalisation de l'électricité sans dire un mot de René Lévesque. Ministre libéral des Ressources naturelles au début des années 60, M. Lévesque a mené pendant des mois une campagne publique en faveur de la nationalisation. C'est cette campagne qui a convaincu les Québécois, puis le premier ministre Lesage de prendre cet audacieux pari. On a beau être partisan, il y a des limites à la malhonnêteté intellectuelle.

 

Jean Charest s'est bien gardé de pavoiser après que les organisateurs du conseil général, affiches et vidéo à l'appui, l'eurent sacré «grand bâtisseur» aux côtés de Godbout, Lesage et Bourassa. Il ne s'est pas moins présenté comme le père de la relance de la construction des grandes centrales hydroélectriques et du développement de l'énergie éolienne dans la province. Or, c'est faux. Le premier ministre qui a initié ces deux virages, c'est Bernard Landry.

Il est vrai que le gouvernement de Jacques Parizeau avait mis un frein aux grands projets de production électrique. Il n'avait pas le choix: l'échec de Grande-Baleine avait montré que la résistance des populations autochtones ne pouvait être vaincue ou contournée.

Il a fallu que M. Landry conclue la Paix des Braves avec les Cris pour que le plus grand projet depuis celui de la baie James, la dérivation de la rivière Rupert, puisse aller de l'avant. Voici ce que déclarait M. Landry, alors premier ministre, il y a sept ans presque jour pour jour: «Le Québec est à l'aube d'une autre grande période de développement de projets énergétiques. Les initiatives que mon gouvernement a annoncées au cours de la dernière année et celles que nous mettrons en place au cours des prochains mois permettront au Québec de connaître la plus importante vague de développement de projets énergétiques depuis les travaux de la baie James.» Et le chef péquiste de «confirmer la ferme volonté de mon gouvernement d'accélérer le développement de l'énergie éolienne au Québec».

Bernard Landry mérite donc, au moins autant que son successeur, le titre de «grand bâtisseur» de l'énergie. Dans ce dossier, le chef libéral a seulement pris la balle au bond. Le «plan Nord» et le développement d'un «nouvel espace économique» pour le Québec sont des initiatives beaucoup plus originales lancées par le premier ministre libéral. Souhaitons que le «plan Nord» prenne bientôt une forme plus concrète que la présentation PowerPoint à laquelle il s'est limité jusqu'à maintenant.

Les libéraux ne sont évidemment pas les seuls à déformer l'histoire à leur avantage. Leurs adversaires péquistes font de même, par exemple lorsqu'ils s'enorgueillissent du choix que le Québec a fait de l'hydroélectricité, oubliant que le PQ était contre la baie James, préférant la filière nucléaire.

L'avenir économique du Québec dépend notamment de sa capacité à exploiter au maximum, dans le respect de l'environnement, ses ressources hydroélectriques et éoliennes. Plutôt que d'en faire un enjeu partisan, les politiciens devraient s'efforcer d'y rallier toute la population.

apratte@lapresse.ca