Alors qu'au Mexique, le nombre de décès causés par la grippe porcine monte en flèche, les quelques dizaines de malades recensés ailleurs sur la planète ont souffert de symptômes relativement bénins. Cela étant, certains accusent déjà les médias d'accorder une importance démesurée à cette nouvelle épidémie et de susciter ainsi une panique qui n'a pas sa raison d'être.

Nous ne sommes pas d'accord. Il n'y a qu'à entendre les spécialistes de la santé publique partout dans le monde pour comprendre que si, hors du Mexique, la situation n'est pas encore dramatique, elle est certainement préoccupante. Partout, notamment au Canada, on s'attend à une augmentation de nombre de personnes atteintes et à des décès. On voit mal comment les médias pourraient ignorer une telle nouvelle.

 

Toute cette information suscite-t-elle l'inquiétude au sein de la population? Bien sûr que oui. Et c'est une excellente chose. Si la peur est parfois mauvaise conseillère, elle est aussi un puissant motivateur. Or, si nous voulons que l'épidémie soit contenue, aucune mesure - ni la surveillance des voyageurs ni l'administration massive de médicaments - ne sera plus efficace que la sensibilisation de la population et du personnel du réseau de la santé.

La tragédie du SRAS - 44 morts en Ontario en 2003 - a montré le tort que peut faire un système de santé mal préparé et nonchalant. Cette affaire a aussi montré qu'une seule personne infectée peut être à l'origine d'une épidémie extrêmement grave. Il n'y a donc pas de chance à prendre.

Depuis la fin de semaine, partout sur la planète, les responsables de la santé publique répètent les mêmes consignes. Consignes tellement simples et efficaces qu'on s'étonne qu'elles ne fassent pas déjà partie de la vie quotidienne de tous:

- lavez-vous les mains fréquemment et minutieusement, à l'eau chaude;

- toussez et éternuez dans votre bras, pas dans vos mains;

- si vous ressentez des symptômes de la grippe, restez à la maison, réduisez au minimum vos contacts avec d'autres personnes et communiquez avec un professionnel de la santé par téléphone.

Si toute l'information diffusée par les médias depuis quelques jours pouvait seulement inciter davantage de gens à adopter ces mesures élémentaires d'hygiène, leur contribution aurait été d'une utilité considérable.

La peur peut être salutaire. La panique, elle, ne le sera jamais. Tout le monde doit faire preuve d'une extrême vigilance mais, par ailleurs, il faut éviter les mesures irréfléchies, spectaculaires mais inefficaces.

Comme l'a rappelé le docteur David Butler-Jones, responsable de la santé publique au Canada, les personnes qui ne sont pas malades n'ont aucune raison de réclamer l'accès à des médicaments. Distribuer des antiviraux à cette étape-ci serait même néfaste puisqu'elle pourrait entraîner une mutation du virus.

Revenons au SRAS: l'épidémie tient son origine d'un médecin de la province chinoise de Guandong qui, porteur du virus, s'est rendu dans un hôtel de Hong Kong pour un mariage. Une seule personne, une pandémie, 800 morts dans 27 pays.

C'est pourquoi aujourd'hui, nous ne pouvons pas nous en remettre seulement aux gouvernements. Chacun a un rôle fondamental à jouer dans la lutte contre la grippe porcine.

apratte@lapresse.ca